Une juge quitte promptement la cour
Une juge a quitté précipitamment une salle d’audience hier, au milieu de la plaidoirie d’une avocate, visiblement mécontente que cette dernière lui rappelle des propos controversés qu’elle a tenus au sujet des policiers en 2012.
« Vous allez très loin Maître, sérieusement. Vous avez un Code de déontologie. [...] Vous rentrez dans le personnel carrément. Vos propos sont inutiles et farfelus. Ce que vous dites présentement est particulièrement odieux », s’est exclamée la juge Joëlle Roy.
La magistrate a par la suite quitté promptement la salle d’audience du palais de justice de Saint-Jérôme pour « une pause de 10-15 minutes », pour n’y revenir que 45 minutes plus tard.
La juge Roy a semblé choquée par les propos de l’avocate qui défend le policier Éric Deslauriers, Me Nadine Touma. Invoquant une « apparence de partialité », la criminaliste demandait à la magistrate de se retirer du dossier de son client à l’étape des observations sur sentence.
Au mois de septembre dernier, la juge Roy a reconnu le sergent de la Sûreté du Québec coupable de l’homicide involontaire d’un adolescent de 17 ans. L’accusé a porté le verdict en appel.
TUÉ PAR DEUX BALLES
En janvier 2014, le policier est intervenu dans la cour de la polyvalente de SainteAdèle lorsqu’il a localisé une voiture volée conduite par la victime.
Le sergent Deslauriers a tenté d’empêcher le jeune homme de quitter les lieux, mais celui-ci a fait vrombir le moteur de la voiture, si bien que le policier a fait feu dans sa direction, craignant pour sa vie. Atteint à deux reprises, l’ado est décédé.
Là où le bât blesse, pour la défense, c’est que la juge Roy a tenu des propos très durs envers les policiers qui emploient la force létale alors qu’elle était présidente de l’Association québécoise des avocats de la défense.
« C’est certain qu’il y a un problème, ça fait je ne sais pas combien de personnes qui se font assassiner en fait par des policiers », a dit Joëlle Roy en entrevue avec Claude Poirier en 2012.
EXCUSES PUBLIQUES
L’avocate, qui militait pour plus d’indépendance dans les enquêtes concernant des policiers, a par la suite dû s’excuser publiquement à la suite d’une mise en demeure d’un syndicat de policiers.
Informée de ces propos à l’automne dernier, la défense demande maintenant à la magistrate de se récuser.
« La présentation de ces requêtes-là n’est jamais agréable. D’aucune façon je n’ai voulu vous vexer », a noté Me Touma, en revenant en cour.
« Pour éviter que ça glisse dans le personnel, tenez-vous-en au juridique », a répondu la juge.
Pour Me Audrey Mercier-Turgeon, de la Couronne, les propos que Joëlle Roy a tenus en 2012 ne doivent pas être sortis de leur contexte.
« Cette entrevue n’avait rien à voir avec le procès », a plaidé la procureure.