MONTRÉAL RETOUR SUR L’IMAGE
1946
AU PARC DE GASPÉ
En arrière-plan, un camion libère son chargement pour le plus grand bonheur des enfants qui s’amusent à monter sur les buttes de sable. Avant d’être vacant, ce terrain a hébergé pendant plusieurs décennies l’usine de meubles, portes et fenêtres de Z. Berthiaume & Fils. À la démolition de la fabrique, en 1946, la Ville profite de l’occasion pour aménager un terrain de jeu dans ce quartier ouvrier densément peuplé. Nommé officiellement le 26 juin 1963, ce parc rappelle la mémoire de la famille Aubert de Gaspé. Ayant donné à la société québécoise des militaires, politiciens et auteurs renommés, c’est par l’entremise d’un mariage, en 1864, que la famille de Gaspé se lie aux Beaubien, très impliqués dans le développement du Mile End et de la Petite-Patrie. Aujourd’hui, le parc De Gaspé est synonyme de patinage et de hockey durant l’hiver. Chaque été, le terrain de soccer, l’aire de jeux et la populaire pataugeoire attirent quelque 10 000 jeunes Montréalais vers cette petite oasis de verdure.
BASEBALL OU BALLE-MOLLE ?
Rassemblés sur un terrain vague, ces jeunes garçons, vêtus de salopettes et bretelles, se préparent pour une partie de balle-molle. L’un d’eux tient une balle de grosseur appréciable, typique de ce jeu. S’inspirant du baseball, la balle-molle est inventée en 1887 à Chicago. Se jouant sur un terrain plus petit, la balle est lancée « par dessous » au batteur. Joué à l’école dans la première moitié du 20e siècle, ce sport demande peu d’équipement : une balle, une batte et quatre coussins. Durant les vacances d’été, les nombreux enfants des familles montréalaises prennent l’habitude de se réunir sur les terrains vacants pour jouer à la ballemolle. Avec le baby-boom et la nécessité d’encadrer cette jeunesse, la Ville commence à aménager de vrais terrains de balle-molle et à organiser les premières ligues. En 1958, Montréal compte déjà 5000 joueurs ! Pratiqué également par les femmes, ce sport compte des équipes de tous âges s’affrontant chaque été dans les parcs montréalais.
DE HANGARS À JARDINS
L’architecture bancale de ces entrepôts révèle l’origine populaire des résidents en 1946. Véritable extension de la maison, ces hangars sont accessibles grâce à d’étroites passerelles et des escaliers de fortune. La cuisine étant à l’arrière des logements, il est facile de se rendre au hangar où est entreposé le charbon ou le bidon d’« huile à chauffage » et d’y recevoir les livraisons à même la ruelle. Un pied dans la cuisine et un autre sur le balcon, les ménagères étendent le linge, échangent les derniers potins avec les voisines et surveillent les jeux des enfants. De la ruelle, l’aiguiseur de couteaux, le livreur de glace, le regrattier de fruits et légumes hèlent les mères de famille. Graduellement abandonnés avec l’arrivée du chauffage électrique, ces entrepôts de bois recouverts de tôles sont souvent à l’origine d’incendies, ce qui entraîne leur graduelle disparition. Si l’arrière-cour est libérée de ses vieux hangars, les résidents de la Petite-Italie en profitent alors pour y faire pousser des tomates et des vignes sur des pergolas.