Cadeaux « importants » en échange de contrats publics
L’ex-maire de Terrebonne Jean-Marc Robitaille et sa garde rapprochée arrêtés au terme d’une enquête de six ans
Il aura fallu six ans à l’Unité permanente anticorruption (UPAC) pour réussir à mettre le grappin sur l’ex-maire de Terrebonne Jean-Marc Robitaille, soupçonné d’avoir aidé ses amis à obtenir des contrats publics en échange d’importants pots-de-vin.
Robitaille, 62 ans, a été arrêté hier matin avec quatre membres de sa garde rapprochée, dont son ex-chef de cabinet Daniel Bélec, et l’ex-directeur général de la Ville, Luc Papillon.
L’enquête de l’UPAC, appelée Médiator, a officiellement commencé en 2014. Mais selon nos informations, c’est dès 2012 que les premières analyses policières des contrats publics de la dixième plus importante ville du Québec ont été entreprises.
Depuis, l’ex-maire a eu le temps d’être réélu pour un cinquième mandat consécutif (en 2013), de mentir publiquement sur ses voyages aux frais d’entrepreneurs (aussi en 2013), de partir en congé de maladie, avant de démissionner (en 2016) et de recevoir des indemnités de départ de 245000 $ payées par les contribuables.
Un entrepreneur bien connu dans la région, Normand Trudel, et l’ex-patron d’une firme de génie, Jean Leroux, sont les autres individus arrêtés hier. Ce sont eux qui auraient corrompu les décideurs à l’hôtel de ville de Terrebonne pendant 12 ans à partir de 2000, selon l’UPAC.
TROIS PERSONNES RENCONTRÉES
L’enquête policière n’est d’ailleurs pas terminée. D’après nos sources, trois autres personnes ont été interrogées, mais pas accusées, hier. L’ex-conseiller municipal Michel Morin, très proche de l’ex-maire, fait partie de ceux-là.
L’UPAC allègue que Robitaille, Bélec et Papillon « recevaient d’importants avantages personnels en échange, entre autres, de changements de zonage ou d’informations privilégiées dans le cadre d’appels d’offres de la Ville ».
Notre Bureau d’enquête avait détaillé, en octobre 2016, la thèse policière. Il était question d’enveloppes d’argent comptant remises au chef de cabinet du maire, de voyages dans le Sud et dans une pourvoirie, et d’une croisière où le champagne coulait à flots.
RECHERCHÉ, VRAIMENT ?
Les cinq individus arrêtés hier font face à de lourdes accusations de corruption dans les affaires municipales et d’abus de confiance. Un à un, ils ont été amenés au quartier général de la Sûreté du Québec, rue Parthenais, à Montréal, avant d’être libérés sous promesse de comparaître le 2 mai prochain. Aucun d’entre eux n’a voulu faire une déclaration.
« Je n’ai aucun commentaire, aucun. Laissez-moi tranquille, s’il vous plaît », a brièvement dit Luc Papillon, lunettes fumées sur le nez.
Une trentaine de policiers participaient aux opérations. Robitaille a même été considéré pendant quelques heures comme étant « recherché » par l’UPAC, alors qu’il se trouvait à son chalet de SaintJean-de-Matha. Cela a irrité son avocat Daniel Rock.
« C’est de la foutaise, ils savent où est-ce qu’il est. […] C’est toujours le cinéma de l’UPAC. C’est plus des metteurs en scène que des policiers », a-t-il pesté sur les ondes de LCN.