Pas de théâtre pour une handicapée
Une étudiante du Cégep de Trois-Rivières ne pourra pas avoir son diplôme parce qu’on la refuse dans un cours
TROIS-RIVIÈRES | Une femme de 23 ans atteinte de paralysie cérébrale qui donne des conférences depuis des années ne pourra pas obtenir son diplôme en Arts, lettres et communication en raison de son handicap.
Annie-Kim Charest-Talbot a commencé à l’âge de six ans à se promener dans des classes pour parler de sa paralysie cérébrale.
Au fil du temps, elle a donné des conférences dans des écoles, des résidences de personnes âgées, a coanimé un gala méritas et participé à des capsules vidéo.
Malgré sa facilité à parler devant des groupes, le Cégep de Trois-Rivières ne la considère pas comme apte à suivre le cours obligatoire de Théâtre québécois dans le cadre de son DEC en Arts et lettres. Elle ne pourra donc pas obtenir son diplôme.
PAS ASSEZ BONNE
Selon elle, la coordonnatrice des services adaptés du cégep lui a dit qu’elle ne serait pas suffisamment capable de bouger ou de projeter sa voix pour en atteindre les compétences. Ce cours est obligatoire à la réussite de son programme.
« C’est vraiment l’atteinte à mon intégrité physique qui m’a fait de la peine. Qu’on me refuse à cause de ma différence, de mon handicap. J’ai eu de la difficulté à accepter qu’en 2018, on puisse mal juger la différence autant que ça », dit-elle.
Elle admet qu’elle ne savait pas si elle obtiendrait un diplôme, car elle doit suivre un cours par session en raison de ses limitations. Maintenant toutefois, ça ne fait plus partie des possibilités.
Elle affirme qu’on a clairement refusé qu’elle suive le cours. Le directeur des études du cégep, Denis Rousseau, parle plutôt d’un « accompagnement vers des choix qui favorisent la réussite », quand le risque d’échec est trop grand (voir autre texte).
Elle a proposé de passer une audition pour montrer sa capacité, mais en vain.
DÉNIGRANT
Elle a donc écrit une lettre d’une page et demie en janvier au directeur général du cégep de Trois-Rivières, Louis Gendron, et au directeur des études, Denis Rousseau.
« Je trouve désolant qu’en 2018, une institution comme le cégep ne sache pas faire preuve d’une plus grande ouverture d’esprit, d’une meilleure capacité d’adaptation ou faire preuve de plus de compréhension », écrit-elle.
La mère de l’étudiante, Denise Charest, considère que le cégep a traité sa fille de façon « un peu sauvage ».
« J’ai trouvé ça extrêmement dénigrant. Peut-être que ce serait difficile de suivre le cours de théâtre pour elle, car il faut qu’elle coure et qu’elle se déplace. Mais le théâtre, ce n’est pas juste ça », ajoute sa mère.
Annie-Kim Charest-Talbot n’est pas retournée au cégep depuis décembre. Elle a été si déçue qu’elle a choisi de rester à la maison cet hiver.
« J’ai senti que je n’y avais plus ma place. Si finalement, ils s’ouvrent au fait que je puisse faire le cours de théâtre, peut-être que j’y retournerai… »