Le Journal de Montreal

Quinze coroners ont dénoncé des délais inacceptab­les

Le Journal n’a pu obtenir le suivi accordé aux recommanda­tions

- JEAN-FRANÇOIS RACINE

« DANS UN MONDE IDÉAL, LES SERVICES AMBULANCIE­RS D’UNE RÉGION DEVRAIENT ÊTRE CAPABLES DE RÉPONDRE AUX BESOINS DE LA POPULATION DESSERVIE. » – La coroner Louise Nolet, au sujet du décès d’un homme de 59 ans de Québec, en 2014

QUÉBEC | Pendant près de 10 ans, au moins 15 coroners ont dénoncé plus d’une vingtaine de fois les délais d’interventi­on trop longs des services ambulancie­rs. Il a toutefois été impossible de connaître le suivi accordé à leurs recommanda­tions.

De 2005 à 2015, une vingtaine de rapports ont ciblé des délais d’interventi­on inacceptab­les, souvent en raison du manque de véhicules. Les coroners ne peuvent souvent pas affirmer que le long délai a causé le décès, mais une interventi­on plus rapide aurait certaineme­nt amélioré les chances de survie du patient.

« Un fait demeure, il n’a pas eu les services requis par son état. Ce décès était évitable », écrit notamment le coroner Michel Ferland à la suite du décès d’un homme de 50 ans, à Laval.

Carmen Gauvin habitait avec son frère Yvon lorsque celui-ci est décédé le 15 février 2012 près de Joliette.

Selon le coroner Bélisle, il a fallu trois appels au service 911 et plus de deux heures trente minutes pour donner suite à cette demande d’assistance.

TROIS HEURES D’ATTENTE

« C’était très long. Si quelqu’un avait pu m’aider, ça aurait été plus rapide de se rendre à l’hôpital par nos propres moyens. Ça ne change pas. Attendre trois heures pour une ambulance, ça arrive », mentionne la dame de 77 ans un peu craintive d’avoir besoin d’un transport d’urgence.

Selon l’Associatio­n des travailleu­rs du préhospita­lier (ATPH), la situation est révoltante. « Nous ne sommes pas pris au sérieux. Les derniers ajouts ne suffisent pas. C’est comme mettre un pansement sur une plaie géante », affirme Frédéric Maheux, président de l’ATPH-CSN.

« [...]Ça va possibleme­nt prendre d’autres décès encore plus tragiques pour changer ça », répond le coroner Pierre Bourassa.

Après des dénonciati­ons répétées des paramédica­ux, le ministre de la Santé Gaétan Barrette a annoncé, en novembre 2017, un montant de 28,2 M$ pour l’ajout de 22 ambulances à travers la province, dont quatre à Québec.

PLUS DE 100 JOURS

Ces rapports ont-ils trouvé écho auprès du gouverneme­nt depuis 20 ans ? L’ex-coroner en chef, Catherine Rudel-Tessier, a suggéré de vérifier « quelles ont été les réponses à ces recommanda­tions ».

À la suite d’une demande d’accès à l’informatio­n le 19 février 2018, le bureau du coroner devait d’abord demander aux organisati­ons visées par ces recommanda­tions si elles acceptent ou non de transmettr­e leurs réponses.

Le 28 mai, près de 100 jours après la demande initiale, Le Journal n’avait toujours rien reçu malgré deux rappels.

 ?? PHOTO D’ARCHIVES, STÉPHANE BOUCHARD ?? Outre la période récente de 2005 à 2015, une dizaine d’autres rapports d’enquête ont aussi été écrits entre 1998 et 2004 par les coroners de l’époque au sujet des délais d’interventi­on des ambulancie­rs sur le territoire québécois.
PHOTO D’ARCHIVES, STÉPHANE BOUCHARD Outre la période récente de 2005 à 2015, une dizaine d’autres rapports d’enquête ont aussi été écrits entre 1998 et 2004 par les coroners de l’époque au sujet des délais d’interventi­on des ambulancie­rs sur le territoire québécois.

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