Victoriaville, berceau de la grippe espagnole au pays
Il y a 100 ans, le virus a fait 14 000 morts au Québec après une réunion catholique
VICTORIAVILLE | En septembre 1918, les Bois-Francs ont reçu des catholiques de partout dans le monde lors du congrès eucharistique. Ça a été le début de la pire épidémie de l’histoire du Canada.
Des fidèles de l’Europe ou des États-Unis, où la grippe espagnole était déjà présente, ont sans doute transporté le virus, surnommé « la Grande Faucheuse », jusqu’à Victoriaville. Le congrès avait accueilli 40 000 visiteurs du 12 au 15 septembre 1918.
Dans les mois qui ont suivi, 50 000 Canadiens sont morts de la grippe espagnole, dont 14 000 au Québec, la province la plus touchée. À Victoriaville, qui était une petite ville à l’époque, 119 personnes sont décédées en cinq semaines, mais plusieurs autres ont été très malades.
On estime qu’entre 20 et 50 millions de personnes sont mortes dans le monde, beaucoup plus que pendant la Première Guerre mondiale.
L’auteure et chercheuse Monique T. Giroux a rencontré plusieurs familles de victimes.
« C’était une situation épouvantable. Les gens de Victoriaville ne sortaient plus de chez eux, car ils avaient peur », dit-elle.
La maladie s’est d’abord propagée au Collège Sacré-Coeur, puis dans des habitations pour démunis situés tout près.
Or, quand le Bureau d’hygiène de Montréal a déclaré l’état d’épidémie le 23 septembre, il a imposé aux religieux de fermer le Collège. Quelque 400 étudiants sont retournés dans leur famille au Québec et dans l’ouest du pays. La maladie s’est ainsi rapidement propagée. En moins d’une semaine, la maladie était partout.
ENTERRÉS VIVANTS
L’état de panique a atteint la population. On croyait au départ être protégé en portant un masque, mais ce n’était pas le cas.
La maladie affaiblissait beaucoup les signes vitaux. Monique T. Giroux affirme que des malades ont été enterrés vivants en raison de l’état de panique.
« Quand on a déménagé les cimetières des années plus tard, on a découvert que quelques corps étaient tournés sur le ventre et que d’autres avaient des poignées de cheveux dans les mains », a-t-elle dit.
Enfermés dans leur maison, les gens recueillaient les dernières nouvelles des livreurs de lait, de bois et de charbon. Ces derniers rapportaient les derniers décès de la journée.
DÉPRIMÉS
« Le monde était déprimé, car ils entendaient parler de mort tout le temps. La messe était fermée et la population n’avait plus de support moral. »
Mme Giroux a rapporté que le journal local n’informait pas la population de ce qui se passait, mais que les médias montréalais suivaient le déroulement de la situation. Toutefois, les avis de décès du journal local n’ont jamais été aussi remplis, en plus des nombreuses publicités sur les médicaments.
Pour souligner ce triste événement, des expositions et des conférences seront présentées sur le territoire de Victoriaville d’ici l’automne.