Le Journal de Montreal

Politique culturelle ou promesse électorale ?

- GUY FOURNIER guy.fournier@quebecorme­dia.com

Il existe en politique une expression que les commentate­urs citent souvent : « Trop peu, trop tard ! » Mardi, le premier ministre Philippe Couillard et Marie Montpetit, ministre de la Culture, ont dévoilé la nouvelle politique culturelle du Québec. Cette fois, on pourrait dire : « Beaucoup trop, trop tard ! »

Quel dommage que le gouverneme­nt ait attendu presque deux ans après son arrivée au pouvoir pour lancer sa consultati­on pour une nouvelle politique culturelle. C’est trop tard maintenant pour qu’elle se traduise en législatio­n et en actions concrètes avant les prochaines élections.

La nouvelle politique en embrasse large – 72 pages bien noircies – et se montre plutôt généreuse. Une carotte de 600 millions de dollars qu’on brandit au nez des artistes, mais pour l’instant, ce n’est rien de plus. Pour que les chiffres soient plus ronflants, on les étale sur cinq ans. Un pactole qui n’est pas aussi spectacula­ire qu’il en a l’air. Surtout si on le compare à celui dont les médecins ont bénéficié… La nouvelle politique est pavée de bonnes intentions, mais les moyens pour la mettre en oeuvre sont définis à très larges traits. Il appartiend­ra au prochain gouverneme­nt de rendre la politique concrète. S’il est libéral, le gouverneme­nt aura alors tout le loisir de démontrer qu’il ne s’agissait pas d’une promesse électorale.

ET SI C’EST LA CAQ ?

Si ce dernier est caquiste, n’espérons pas que la politique soit mise en oeuvre sans modificati­ons. Jusqu’à maintenant, le parti de François Legault n’a guère parlé de culture. Il n’en fera pas un cheval de bataille durant la campagne électorale. Quant au Parti québécois, ayant toujours pris les artistes pour acquis, il ne s’est jamais montré plus généreux qu’il ne faut à leur endroit.

Cela dit, la politique culturelle annoncée mardi est dans le droit fil de celle mise en oeuvre en 1992 par mon amie Liza Frulla lorsqu’elle était ministre de la Culture. Liza faisait d’ailleurs partie du comité que Luc Fortin, prédécesse­ur de Marie Montpetit, avait formé pour le conseiller.

En 1992 comme aujourd’hui, le gouverneme­nt reconnaît que les industries culturelle­s ont une importance stratégiqu­e dans notre développem­ent économique, qu’elles doivent disposer du capital nécessaire pour produire des oeuvres novatrices et concurrent­ielles et que la SODEC, fer de lance de l’État en matière de culture, doit être financée généreusem­ent.

DE NOUVELLES PRIORITÉS

L’ère numérique a fait naître d’autres priorités, notamment l’importance pour nos oeuvres d’être « découverte­s », au Québec comme à l’étranger. Dans la légion de contenus offerts sur internet, la découverte des nôtres ne va pas de soi. Il faut aussi faciliter leur exportatio­n. De nouvelles discipline­s comme les jeux vidéo et la réalité augmentée sont nées avec le numérique et il faut s’assurer que le Québec, qui est dans le peloton de tête, puisse y rester.

Pour ne pas être en reste avec le fédéral, la nouvelle politique culturelle prévoit mettre en place des conditions et des structures pour faciliter la création et la diffusion des oeuvres des Premières Nations et des Inuits. On veut aussi faciliter la transmissi­on des langues autochtone­s aux nouvelles génération­s.

Enfin, on reconnaît, mais dans un tout petit paragraphe, la contributi­on de la minorité anglophone à la culture québécoise et l’importance de mettre davantage en lumière l’apport des artistes et artisans de langue anglaise.

Mais qu’adviendra-t-il de tout ça après le 1er octobre ?

La nouvelle politique est pavée de bonnes intentions, mais les moyens pour la mettre en oeuvre sont définis à très larges traits

 ??  ?? Marie Montpetit
Marie Montpetit
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada