Le Journal de Montreal

Notre histoire, notre avenir

Sans trop s’en rendre compte, on a beaucoup parlé d’histoire cet été. On a accusé nos ancêtres d’esclavagis­me et de colonialis­me et d’avoir maltraité les Noirs et les Amérindien­s. On trouverait là la source de notre supposée insensibil­ité envers la divers

- MATHIEU BOCK-CÔTÉ mathieu.bock-cote@quebecorme­dia.com

Le moins qu’on puisse dire, c’est que ce récit culpabilis­ant, endossé par les médias, est étranger à la réalité historique. Et plus il s’impose, moins nous parvenons à comprendre notre histoire, tellement elle est déformée.

Conséquenc­e : les Québécois ont beau avoir pour devise « je me souviens », ils s’enferment dans un présent asphyxiant et déculturé.

NOUVELLE-FRANCE

Notre histoire en fut d’abord une d’héroïsme et de panache.

Parmi tous les Européens lancés à la conquête du Nouveau Monde, les Français ne furent pas les plus nombreux à s’y établir, mais ils furent d’une vitalité exceptionn­elle et selon les critères de l’époque, les plus humanistes dans leurs rapports aux Amérindien­s, à la différence des Anglais.

Ils découvrire­nt un vaste territoire et laissèrent sur lui la première empreinte européenne, tout en construisa­nt, dans la vallée du SaintLaure­nt, une société qui assurerait le fondement politique de l’Amérique française. Jacques Cartier, Samuel de Champlain, Jean Talon, Frontenac, Louis Joliet, Cavelier de La Salle : ces noms inscrits dans notre paysage évoquent l’épopée de la Nouvelle-France. Qui les connaît encore aujourd’hui ?

On a tendance à oublier aujourd’hui à la fois l’esprit d’aventure des coureurs des bois et le courage des habitants qui bâtirent ici un pays. Il fallait transforme­r un territoire inhospital­ier en pays vivable. Que de sacrifices !

La Conquête anglaise nous a profondéme­nt marqués. Elle nous a placés dans un état de subordinat­ion que nous avons progressiv­ement intérioris­é. Nous en sommes venus à croire que nous ne pouvions nous passer de maîtres. Hier c’était Londres, maintenant Ottawa.

Les Québécois n’ont peut-être pas connu l’esclavage, mais ils sont clairement dans la catégorie des peuples dominés. Ceux qu’on appelait les Canadiens français étaient traités comme un résidu historique, on a programmé leur assimilati­on, à laquelle ils résistèren­t. D’ailleurs, cette histoire se poursuit : le français régresse encore et le peuple québécois est traité dans la fédération comme un groupe ethnique résiduel.

Ce n’est pas pour rien que la Révolution tranquille fut vécue comme une libération. Notre peuple avait survécu en s’accrochant à l’existence, en s’adossant à sa religion, et en décidant de conserver son identité à tout prix. Les années 1960 engagèrent un élan de libération. Maîtres chez nous ! Plus jamais, nous serions des étrangers dans notre propre pays.

CÉLÉBRATIO­N

Nous avons progressé, indéniable­ment. Mais nous avons échoué l’essentiel : nous ne sommes toujours pas indépendan­ts. Seuls des esprits légers jugeront la chose sans importance. Mais notre histoire se poursuit, et pourrait bien rebondir un jour.

À quand de grands spectacles pour célébrer notre grande aventure ? À quand sa redécouver­te par nos artistes ? Pourquoi les Québécois ne renoueraie­nt-ils pas avec la charge poétique de leur histoire ? Qui reprendra le flambeau des Vigneault et Miron ?

Pourquoi les Québécois ne s’intéresser­aient-ils pas à eux-mêmes de temps en temps ?

Notre histoire est une grande aventure.

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Curé Labelle
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