Réplique de Mathieu Bock-Côté
Personne ne doute de la bonne foi d’Émile Proulx-Cloutier lorsqu’il pense tendre la main aux Amérindiens. Mais en reprenant la bouleversante chanson Mommy, qui évoquait l’anglicisation du peuple québécois, pour y plaquer des paroles suggérant l’assimilation des Amérindiens par les Québécois francophones, il entretient une légende toxique.
Qu’on le veuille ou non, tous les « Blancs » ne sont pas interchangeables et les Français n’ont pas eu la même relation avec les Amérindiens que les Anglais. La détestable Loi sur les Indiens est une loi fédérale, représentative de la philosophie britannique en matière de traitement des populations autochtones. Les Québécois sont-ils coupables des crimes d’Ottawa ? L’héritage de René Lévesque est très différent. Si j’ai trouvé Maman détestable (ce qui ne m’empêche pas d’apprécier l’oeuvre de Proulx-Cloutier), c’est qu’elle dissimule une fausseté derrière une bonne intention.
Proulx-Cloutier croit tendre la main : en fait, il bat sa coulpe. Triomphe ainsi la mauvaise conscience. Hannah Arendt écrivait : « Il est presque agréable de se sentir coupable quand on n’a rien fait : on se sent alors noble […] ». Par ailleurs, l’assimilation des Québécois francophones ne se situe pas dans un futur cauchemardesque. C’est une réalité montréalaise bien contemporaine qui s’accélère. Peut-être devrait-elle inspirer une chanson à monsieur Proulx-Cloutier ?