50e anniversaire du spectacle Chansons et poèmes de la résistance et du fameux poème « Speak White » de Michèle Lalonde
Au Québec de la période pré-Révolution tranquille, les mots sont le principal moyen de résistance des poètes. Ces écrivains dominent la scène artistique,
%"** %+ # , %* # )+ * culture et de sa langue. Les arts sont en véritable ébullition, faisant de plusieurs artistes des contestataires porteurs des revendications et révolutions que la nation allait vivre dans les années à venir. Durant les années 1960, plusieurs arrestations de membres soupçonnés du Front de libération du Québec (FLQ), faisant d’eux des prisonniers politiques, causent beaucoup de remous dans la sphère publique. On dénonce les commentaires désobligeants, voire méprisants, des juges à l’égard des idéologies politiques des prisonniers lors des procès. En 1966, Pierres Vallières et Charles Gagnon, s’étant rendus aux États-Unis pour nouer des liens avec les Black Panthers, le mouvement révolutionnaire de libération afro-américaine, manifestent devant le bâtiment de l’ONU, à New York, en soutien aux membres de leur réseau arrêtés à Montréal. Ils seront eux-mêmes arrêtés suite à ces actions. Pour résister à ces arrestations politiques et pour soutenir Vallières et Gagnon, le spectacle Chansons et poèmes de la Résistance sera imaginé. Parmi les artistes participants, on compte notamment Gaston Miron, Gilles Vigneault, Raoul Duguay, Claude Gauvreau, ou encore Michèle Lalonde. À l’époque, Michelle Rossignol, comédienne, informe Michèle Lalonde de la soirée qui allait se tenir à Montréal au théâtre de la Comédie-Canadienne (dorénavant le Théâtre du Nouveau Monde). Comme plusieurs poètes allaient être de la partie, elle lui propose de produire un texte pour l’occasion. En octobre 1968, pour une première fois, sera lu Speak
White. Il sera relu dans d’autres représentations du spectacle, ainsi que par la poète elle-même, lors de la fameuse Nuit de la poésie en 1970 (cette dernière prestation
"## ,)* + #$ ' ) # ) #"* + ,) Jean-Claude Labrecque et se retrouve sur le Web). Le poème et son titre font référence à plus d’un aspect de la société de cette période. D’abord, Michèle Lalonde l’a beaucoup répété : la paternité de l’expression
Speak White provient d’abord de l’insulte raciste utilisée à l’époque coloniale, sur # * '# %+ +"&%* *"!%" %+ (, ,% * # ne pouvait pas parler sa langue et devait adopter celle de ses maîtres. Par la suite, cette expression s’est retrouvée ici, au Québec, pour insulter tous ceux qui parlaient la langue de Molière. Si l’utilisation de cette expression méprisante a dimi%, , &,' , # * %% * &% pu malheureusement la voir ressurgir à quelques reprises, notamment en 2007 par un chroniqueur de la CBC au sujet d’un député fédéral et de sa maîtrise de la langue anglaise. Dans Speak White, la poète fait également directement référence à l’ouvrage de Pierre Vallières, publié en 1968 : Nègres blancs d’Amérique. Écrit en prison et mis à l’index en 1969, cet essai révolutionnaire dénonce la condition de misère des Canadiens français de l’époque, tout en suggérant qu’ils étaient aliénés face au capitalisme nord-américain et au colonialisme canadien-anglais. Michèle Lalonde s’est donc inspirée de ces thèmes décrits par Vallières pour écrire son poème coup de poing.
Speak White est une oeuvre étonnante dans sa forme. Bilingue, politique, mais surtout poignant, le texte met les mots justes sur les sentiments d’injustice et de résilience du Canadien français de l’époque. Pour plusieurs qui ont analysé ce poème, l’utilisation de notre langue française bien à nous, « notre parlure pas très propre / tachée de cambouis et d’huile », est un moyen de traduire l’oppression du peuple québécois. La poète illustre alors l’identité du travailleur francophone, passant sa journée à l’usine, dirigé par des riches contremaîtres anglophones, vivant dans des quartiers ouvriers. À l’époque de l’écriture du poème, la société québécoise bouillonne, s’apprête à entrer dans la période de la
-&#,+"&% +) %(,"## + * &,-) % # $ %+ ,% )+ +) - )* *&% " %+"+ + * ) *"*+ % ++ . )- * % + * émotions transparaissent tout au long de cette grande oeuvre de Michèle Lalonde, qui se doit d’être, encore aujourd’hui, célébrée, relue et visionnée.