LES ADOLESCENTES PRENNENT 3 FOIS PLUS D’ANTIDÉPRESSEURS
Depuis 10 ans, trois fois plus d’adolescentes consomment des antidépresseurs
QUÉBEC | « Je ne connais pas la vie sans anxiété. L’anxiété a toujours pourri ma vie. »
D’aussi loin qu’elle se souvient, Amanda Beaulieu a toujours été angoissée. Depuis quelques années, elle prend des antidépresseurs pour tenter de reprendre le contrôle sur sa vie.
Elle est d’ailleurs loin d’être la seule. La consommation d’antidépresseurs a presque triplé chez les adolescentes au cours des 10 dernières années, a appris Le Journal (voir autre texte). Plusieurs en consomment pour des problèmes reliés à l’anxiété, comme la jeune femme de Pincourt, aujourd’hui âgée de 21 ans.
Toute petite, elle souffrait d’anxiété de séparation. Ses parents sont séparés et elle avait peur de ne pas les revoir, lorsque venait le moment de les quitter.
À l’école secondaire, c’est l’anxiété de performance qui prend le dessus. « Il fallait que je réussisse. Je me disais que si je n’avais pas 80 %, je ne réussirais pas ma vie », raconte-t-elle.
Les nuits blanches se succèdent. Les crises de panique aussi. En classe, lors d’examen ou même au cours d’une banale journée sans histoire. « Je tremblais, je pleurais et j’avais de la difficulté à respirer. C’était assez effrayant à voir », affirme la jeune femme aujourd’hui âgée de 21 ans.
« UN CERCLE VICIEUX »
L’anxiété prend sournoisement le contrôle de sa vie. « J’étais comme paralysée, mon anxiété m’empêchait de faire des activités. J’essayais d’éviter tout ce qui me rendait anxieuse. »
Repliée sur elle-même, l’adolescente commence à se mutiler. Les coupures qu’elle s’inflige lui permettent « de se sentir mieux, pendant un petit moment ».
« C’est tout ce que j’avais trouvé pour me soulager. Mais c’est un cercle vicieux qui ne s’arrête plus après. On se fait des marques, on se trouve laide. On se dit qu’il n’y a plus d’échappatoire, que ça ne sert à rien de continuer. »
Une intervenante de l’école lui vient en aide. Elle est hospitalisée en 2014, alors âgée de 16 ans.
Amanda sort de l’hôpital avec une prescription pour des antidépresseurs et un diagnostic de trouble anxieux accompagné d’un trouble de panique. Elle a aussi à son agenda un rendez-vous avec un psychologue, pour un suivi thérapeutique.
Cinq ans plus tard, la jeune femme prend toujours des antidépresseurs et est toujours suivie par un psychologue. Malgré les hauts et les bas des dernières années, elle a réussi à terminer ses études secondaires et occupe maintenant un emploi à temps partiel, dans le commerce de détail. Depuis environ un an, les crises de panique ont cessé.
DIMINUER LES ANTIDÉPRESSEURS
La jeune femme a commencé à diminuer sa consommation d’antidépresseurs depuis quelques jours, une recommandation de son médecin et de son psychologue. Elle est bien informée de ce qui l’attend.
« Je sais que ce n’est pas facile de réduire. Déjà on sent le système qui a un manque, mon sommeil est plus agité », dit-elle, consciente que la prise à long terme de ce type de médicament est loin d’être recommandée.
Néanmoins, elle se réjouit du chemin parcouru et insiste pour parler ouvertement de ce qu’elle a vécu. « Il ne faut pas avoir honte d’être comme ça. Chaque être humain vit ses émotions de différentes manières. Il faut l’accepter et accepter de se faire aider. C’est le plus dur.
« C’EST TRÈS DIFFICILE [D’ARRÊTER DE PRENDRE DES ANTIDÉPRESSEURS]. APRÈS PLUS DE DEUX ANS, ON DEVIENT PLUS ACCRO À ÇA. » – Amanda Beaulieu, 21 ans