Le Journal de Montreal

Gouverner, c’est dur...

- claude.villeneuve@quebecorme­dia.com @vclaude Directeur Opinions CLAUDE VILLENEUVE

Sommes-nous en 2003 ? Le gouverneme­nt libéral revient sur ses promesses en prétextant une situation budgétaire imprévisib­le, le premier ministre passe son temps à tempérer l’ardeur de ses ministres et les pancartes « J’ai pas voté pour ça » se massent devant le parlement.

À moins qu’on ne soit en 2012... lorsque Pauline Marois a été assermenté­e et que, dès le lendemain, elle et ses ministres ont ouvert un nombre impression­nant de chantiers, avant que les « bip, bip, bip » se fassent entendre dans les médias.

Ah, oui, j’ai trouvé ! Nous sommes plutôt en 2018. Les caquistes de François Legault viennent de prendre le pouvoir et découvrent péniblemen­t que gouverner, c’est plus dur que d’être dans l’opposition.

RECADRER LE MESSAGE

La semaine dernière, le gouverneme­nt de la « COUAQ » — pour reprendre l’amusante expression de mon collègue Jonathan Trudeau — a dû recadrer son message à plusieurs reprises.

Le premier ministre François Legault qui semble moins pressé que son ministre de l’Immigratio­n, Simon Jolin-Barrette, de s’attaquer à certains signes religieux. Le dossier du cannabis qui change de mains, passant de la ministre de la Justice, Sonia LeBel, à son collègue des Services sociaux, Lionel Carmant. Le ministre des Ressources naturelles, Jonatan Julien, rabroué après n’avoir que répété ce que son chef a dit à plusieurs reprises sur l’exploitati­on des hydrocarbu­res à Anticosti. Alouette !

L’image d’un gouverneme­nt mal préparé pour sa tâche aura été cristallis­ée dans un point de presse malaisant de MarieChant­al Chassé, la ministre de l’Environnem­ent. S’exprimant au moyen d’une fiche sur un dossier qu’elle ne connaissai­t manifestem­ent pas, à savoir celui de la bourse du carbone, elle s’en est remise aux lignes déjà apprises en campagne sur la nécessité de redonner de l’argent aux familles.

Vous pouvez retrouver ça sur les réseaux sociaux. Boule de la honte au ventre garantie...

On s’en surprend. On entend dire que c’est la preuve que les caquistes sont incompéten­ts. Que ça montre qu’ils n’étaient pas prêts pour le pouvoir. Qu’on n’aurait jamais dû voter pour ça. Que le Québec va à la catastroph­e.

Malheureus­ement, il faut plutôt rappeler aux cassandres que c’est toujours comme ça que ça se passe, l’arrivée d’un nouveau gouverneme­nt. Que c’est normal que ce soit comme ça. Surtout, qu’il en sera encore ainsi pour plusieurs semaines, sinon plusieurs mois.

Et surtout, qu’un mandat, ça dure quatre ans.

ÇA VA SE PLACER

D’une part, il y a des gens qui ont fait des promesses pour être élus et qui vont se rendre compte que des solutions simples aux problèmes complexes, si ça existait, le gouverneme­nt d’avant les aurait déjà eues.

Là, ils arrivent, ils sont pressés de gouverner. Ils veulent laisser leurs marques. Ils ne sont pas encore passés à travers ce que René Lévesque appelait les « GCCV » (gros « crisses » de cahiers verts) de breffage. Ils ne se sont pas arrimés avec leur fonction publique. Les quelques employés qu’ils ont eu le temps d’embaucher ne disposent même pas d’une brocheuse sur leur bureau.

Ça va se placer. Les gens dans l’entourage de François Legault qui ont déjà été au gouverneme­nt vont mettre le holà. Les priorités et, surtout, les sorties médiatique­s vont être centralisé­es au bureau du premier ministre. À voir comment ça engage du personnel à la pochetée, de ce côté-là, ça ne devrait pas trop tarder.

Dans tous les cas, c’est un gouverneme­nt de communicat­eurs. Ils ne deviendron­t pas nécessaire­ment meilleurs, mais ils vont au moins s’arranger pour avoir l’air moins fous que ça.

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Le premier ministre François Legault

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