Le Journal de Montreal

Le fondateur de Guess Jeans aurait emprunté à la mafia

La GRC l’aurait entendu parlemente­r avec Leonardo Rizzuto et Stefano Sollecito

- HUGO JONCAS 438.396.5546 hugo.joncas@quebecorme­dia.com – Avec la collaborat­ion d’Eric Thibault, Philippe Langlois et Andrea Valeria.

Le Montréalai­s d’adoption Georges Marciano, fondateur de Guess Jeans, se serait tourné vers deux dirigeants de la mafia pour emprunter 325 000 $, a appris notre Bureau d’enquête.

C’est ce que révèlent des résumés de filature policière de l’opération Magot contre le crime organisé, qui peuvent maintenant être rendus publics.

Difficile de savoir si l’ex-collection­neur d’oeuvres d’art, de belles voitures et de bijoux a remboursé toutes ses dettes à Leonardo Rizzuto et Stefano Sollecito, dirigeants de la pègre italienne.

En août 2015, les deux caïds se montraient toutefois impatients, selon une conversati­on que la Gendarmeri­e royale du Canada (GRC) a intercepté­e dans le lobby de LHôtel Montréal, le luxueux hôtel de Georges Marciano, où l’homme d’affaires a accroché de nombreuses oeuvres de grands maîtres comme Andy Warhol et Joan Miró, dans le Vieux-Montréal.

« Stefano [Sollecito] désire être payé et Georges [Marciano] dit qu’il a déposé un chèque dans le compte de Leonardo [Rizzuto] d’environ 325 000 $, dans un compte au nom d’une compagnie », mentionne l’affidavit d’un policier produit pour obtenir des mandats d’écoute électroniq­ue.

CHIFFRES INCORRECTS

Sollecito répond alors que ces « chiffres sont incorrects ». Puis Rizzuto dit « qu’il rencontre des gens au bureau à Loris », en parlant de l’avocat Loris Cavaliere, arrêté en même temps que les deux caïds dans le cadre de l’opération Magot, en novembre 2015.

Les documents ne disent pas s’ils ont réglé leur différend financier, mais un juge aborde ce prêt dans sa décision de 2016 sur la remise en liberté des deux mafieux.

Il mentionne que l’enquêteur au dossier « reconnaît que la transactio­n entre Leonardo Rizzuto et l’homme d’affaires Marciano ne peut être qualifiée de transactio­n criminelle et qu’elle apparaît légale », sans donner de détails.

À cette époque, l’ancien magnat du jean délavé sortait d’un long conflit avec des créanciers américains. En 2013, d’anciens employés étaient parvenus à faire saisir ses actifs montréalai­s pour se faire payer une dette de 86 M$ US, après avoir obtenu un jugement contre lui pour diffamatio­n et « grave souffrance morale ».

Le fondateur de Guess Jeans n’a pas voulu expliquer son emprunt à Rizzuto et Sollecito.

« M. Marciano n’a pas de commentair­es à faire », dit un de ses avocats contactés par notre Bureau d’enquête, Quentin Leclercq.

Son ancien employé, Donato Trafficant­e, qui était aussi présent à cette rencontre avec Rizzuto et Sollecito, selon le document policier, assure qu’il n’en garde aucun souvenir.

« Je n’ai jamais entendu parler d’argent qu’il leur aurait emprunté, dit-il. M. Marciano n’a rien à voir avec eux. »

Georges Marciano et Donato Trafficant­e n’ont jamais fait l’objet d’accusation­s en lien avec l’opération Magot, qui a permis la condamnati­on du caïd Gregory Woolley à une peine de huit ans de prison pour trafic de cocaïne.

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 ?? PHOTOS D’ARCHIVES ET BEN PELOSSE ?? Georges Marciano, le fondateur de Guess Jeans, a acheté entre 2007 et 2009 pas moins de 18 immeubles dans le Vieux-Montréal, dont celui qui abrite LHôtel Montréal (en mortaise).
PHOTOS D’ARCHIVES ET BEN PELOSSE Georges Marciano, le fondateur de Guess Jeans, a acheté entre 2007 et 2009 pas moins de 18 immeubles dans le Vieux-Montréal, dont celui qui abrite LHôtel Montréal (en mortaise).

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