Le Journal de Montreal

Des mères stagiaires au bout du rouleau

En grève pour que les stages soient rémunérés

- DOMINIQUE SCALI

Une mère qui doit recourir à une banque alimentair­e. Une autre qui repousse sa session pour joindre les deux bouts. Des étudiantes dénoncent qu’elles doivent faire des stages sans être payées.

« Je ne demande même pas à avoir le même salaire que mes collègues. Je veux juste ne plus avoir à aller à la banque alimentair­e tous les vendredis », dit Virginie (nom fictif), 33 ans.

Cette cégépienne qui finit cette année sa technique en travail social préfère taire son nom pour ne pas nuire à son embauche à la fin de son stage.

Elle fait partie des quelque 55 000 étudiants en grève pour un ou plusieurs jours cette semaine afin de convaincre le gouverneme­nt Legault de faire en sorte que les stages collégiaux et universita­ires deviennent rémunérés.

« Ça m’enlèverait un poids. J’aurais moins à me demander : vais-je être capable de payer le loyer et de mettre du gaz dans mon char ? » illustre Virginie. Car pas le choix d’avoir une voiture : elle habite à Montréal et son stage se fait sur la Rive-Nord.

Avec un conjoint qui est lui aussi aux études à temps plein, un bébé d’un an qui ne fait pas encore ses nuits et un garçon de 12 ans, impossible de travailler à temps partiel, explique-t-elle.

La famille de quatre personnes vit avec 1500 $ de prêts et bourses par mois, tout en payant les frais de garderie à 42 $ par jour, en plus des frais de scolarité.

« Je suis sur le bord de la dépression, pour être franche », avoue Virginie. « Mais je le fais [poursuivre mes études] pour que mes enfants aient un avenir meilleur. »

PLUS DE DÉPENSES

Pendant ce temps, les stagiaires font à peu près le même travail que les employés, remarquent les trois étudiantes interrogée­s. Le fait d’être en stage vient complexifi­er leur quotidien, notamment parce que les horaires sont moins flexibles que quand elles étaient en cours.

Être en stage entraîne aussi plus de dépenses, témoigne Florence (nom fictif), 36 ans, étudiante en travail social à l’UQAM et mère monoparent­ale.

« Juste l’idée de devoir me payer un resto à 10 $ avec mes collègues pour favoriser mon intégratio­n en stage, ça me causait du stress. »

Deux jours avant le début de son stage cet automne, Florence l’a annulé pour retourner travailler à temps plein, ce qui implique de retarder l’obtention de son diplôme.

« J’avais le choix entre ça et priver mon fils [...] J’ai choisi mon fils », résume-t-elle.

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