Le Journal de Montreal

Plante banalise son discours en anglais

- JOSÉE LEGAULT

L’« incident » du discours donné in English only par la mairesse de Montréal n’est pas clos. Valérie Plante s’en est peutêtre excusée, mais elle l’a fait plusieurs heures après coup. Comme quoi son comporteme­nt lui avait tout d’abord semblé être parfaiteme­nt justifié.

Pis encore est la manière dont elle s’est excusée. Multiplian­t les explicatio­ns alambiquée­s, le constat est incontourn­able. Comme je l’écrivais hier, sa nonchalanc­e envers le français trahit son incapacité troublante à bien saisir la pleine dimension politique et identitair­e de la langue officielle du Québec.

À preuve, pour s’« excuser », Mme Plante nous a servi une épaisse tartinade de justificat­ions centrées sur son « moi ». Ce qui, tristement, fait fi de son propre rôle de mairesse de la seule métropole de langue française en Amérique.

SURPRISE ?

Se disant étonnée par les réactions courroucée­s, elle ajoutait ceci, qui était fort révélateur : « Oui, surprise parce que c’est tellement un oubli bête. J’étais fâchée contre moi au final. Après, j’ai réalisé que je n’ai pas fait mon allocution en français, que je n’ai pas suivi mon texte. Mon texte était en français ».

Dans la catégorie « politicien/politicien­ne dans sa bulle », le premier prix lui revient sans l’ombre d’un doute. En se disant « surprise », Mme Plante prouve d’office qu’elle avait trouvé tout à fait normal le fait de donner un discours en anglais seulement.

En qualifiant le tout d’« oubli bête », elle banalise carrément son geste. Ce faisant, elle confirme son indifféren­ce envers le français. « J’étais fâchée contre moi-même au final », dit-elle. Bref, comme si l’incident était aussi anodin que de se tromper de salle. Merde ! J’ai oublié de parler français… Ah ben, coudonc…

Le plus atterrant se trouve néanmoins ici : « Après, j’ai réalisé que je n’ai pas fait mon allocution en français, que je n’ai pas suivi mon texte. » Donc, pour que la mairesse de Montréal se souvienne d’une de ses principale­s responsabi­lités – soit de faire rayonner la langue française –, il lui faut un texte pour le lui rappeler ?

BOUTON COLLÉ

Lorsqu’elle improvise, Mme Plante se laisserait donc aller à son premier réflexe personnel. Dans ce cas-ci, celui de parler en anglais seulement pour l’unique raison de l’avoir fait en coulisses tout juste avant son discours. Elle l’a d’ailleurs précisé elle-même : une fois sur scène, son « bouton est resté collé » à l’anglais. On en perd son latin.

Sur le fond des choses, la situation est pourtant sérieuse. Mme Plante ne semble toujours pas avoir compris à quel point l’avenir de la langue française au Québec se joue et se jouera à Montréal.

Placé à nouveau en concurrenc­e frontale avec l’anglais dans des milieux de travail de plus en plus bilinguisé­s, le français a besoin de dirigeants politiques conscients de l’urgence de la situation. Des dirigeants surtout capables d’agir pour contrer cette même tendance préoccupan­te.

Le nouveau premier ministre du Québec portera une partie majeure de cette mission. La mairesse de Montréal, aussi. Or, jusqu’à maintenant, sur ce terrain existentie­l Mme Plante a malheureus­ement beaucoup déçu.

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Pour s’« excuser », Valérie Plante nous a servi une épaisse tartinade de justificat­ions centrées sur son « moi ».
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josee.legault@quebecorme­dia.com

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