Alerte maximale en France
Le gouvernement veut à tout prix éviter les manifestations violentes des « gilets jaunes » prévues aujourd’hui
PARIS | (AFP) La France était en état d’alerte maximale hier à la veille de nouvelles manifestations de « gilets jaunes » qui font craindre une répétition des émeutes à Paris, un scénario que le gouvernement veut à tout prix éviter, mobilisant massivement son appareil sécuritaire.
Le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, a présenté un dispositif de sécurité « de grande envergure », avec notamment le déploiement dans la capitale de véhicules blindés de gendarmerie capables de détruire des barricades.
Commerçants protégeant leurs vitrines, spectacles annulés ou fermetures de stations de métro témoignent de ce climat d’anxiété. De nombreuses capitales étrangères ont appelé de leur côté leurs ressortissants présents en France à la prudence.
GRANDE INQUIÉTUDE
L’exécutif en appelle au sentiment républicain parmi les Français, ne cachant pas une grande inquiétude face à un risque de situation insurrectionnelle et à la répétition d’images de violence qui ont fait le tour du monde.
« Ces trois dernières semaines ont fait naître un monstre qui a échappé à ses géniteurs », a déclaré Christophe Castaner pour qualifier la révolte des « gilets jaunes » — ces Français issus des classes moyennes et populaires dénonçant la politique fiscale et sociale du gouvernement — devenue le creuset de toutes les contestations françaises, comme celle des lycéens.
Le recul du gouvernement sur la taxation du carburant, élément déclencheur de la fronde, n’a pas permis d’apaiser un mouvement déstructuré, évoluant hors des cadres établis, et sans leader.
Un certain nombre de gilets jaunes, mais aussi de personnalités, ont appelé à ne pas manifester à Paris pour éviter des violences qui, jusqu’ici, n’ont pas entraîné directement la mort de manifestants, casseurs ou membres des forces de l’ordre.
L’appareil d’État, qui, depuis trois semaines, ne parvient pas à apaiser poli- tiquement cette colère populaire, déploie son arsenal sécuritaire, judiciaire et administratif pour assurer l’ordre public.
89 000 POLICIERS
Au total, 89 000 policiers et gendarmes seront déployés dans toute la France samedi pour éviter de revivre les scènes de la semaine précédente : affrontements sous l’Arc de Triomphe, barricades enflammées dans les beaux quartiers, pillages, nuages de gaz lacrymogène pour tenter de disperser des « gilets jaunes » et des casseurs incontrôlables.
« Tout laisse à penser que des éléments radicaux vont tenter de se mobiliser », selon M. Castaner.
Une délégation de « gilets jaunes » a été reçue hier soir par le premier ministre, Édouard Philippe, qui s’est dit « conscient de la gravité de la situation ».
M. Philippe « nous a écoutés et promis de porter nos revendications au président de la République. Maintenant nous attendons M. Macron. J’espère qu’il va parler au peuple de France comme un père, avec amour et respect, et qu’il prendra des décisions fortes », a déclaré à la sortie Christophe Chalençon, un porte-parole du mouvement.
MACRON SILENCIEUX
Silencieux toute la semaine, M. Macron a fait savoir qu’il ne s’exprimerait sur la crise qu’en début de semaine prochaine.
Sur les réseaux sociaux, le principal vecteur d’organisation des gilets jaunes, certains mots d’ordre évoquent clairement un changement de régime ou un départ de M. Macron.
Très impopulaire, conscient qu’il cristallise le ressentiment d’une part importante des Français, le chef de l’État, élu en 2017 en se présentant comme l’homme du changement, mais régulièrement accusé par ses détracteurs d’être le « président des riches », « ne souhaite pas mettre d’huile sur le feu », selon le président de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand. D’autant que le mouvement des « gilets jaunes » est, lui, très largement populaire, d’après les sondages.