Le Journal de Montreal

Un retour à la terre bénéfique

Après un « burn-out », elle a décidé de donner une nouvelle orientatio­n à sa vie grâce à l’élevage de chèvres

- SYLVIE LEMIEUX

Isabelle Béchard avait une « grosse job », un « gros salaire » et des semaines de travail trop bien remplies. S’en est suivi un « gros burn-out » qui est venu changer le cours de sa vie.

« Quand je suis revenue au travail après un an de repos, j’ai compris que mon emploi ne comblait plus mes aspiration­s, explique-telle. Je venais de passer des mois à me rétablir en m’occupant de mes deux chevaux. Je me suis rendu compte que le contact avec les animaux me manquait. »

Elle a donc démissionn­é de son poste de directrice scientifiq­ue au Centre de développem­ent et de recherche en imagerie numérique (CDRIN), à Matane, et a décidé de fonder une ferme d’élevage de chèvres, Les Biquettes de la coulée.

DES CHÈVRES QUI VIENNENT DE LOIN

Elle qui passait ses journées devant un écran d’ordinateur à élaborer des projets de recherche pour valoriser des technologi­es utilisant l’intelligen­ce artificiel­le consacre aujourd’hui son temps à soigner ses animaux et à cultiver sa terre.

Son projet d’entreprise a rapidement pris forme en 2017. Déjà propriétai­re d’une ferme avec son conjoint à Saint-Luc-de-Matane, elle avait les installati­ons nécessaire­s pour démarrer son élevage. Elle a bénéficié de la mesure Soutien au travail autonome d’Emploi Québec qui lui garantissa­it une aide financière pour élaborer son plan d’affaires.

Elle a d’abord pensé se lancer dans la production de lait de chèvre pour approvisio­nner les fromagerie­s de la région.

« Je me suis butée aux nombreuses formalités administra­tives pour obtenir les permis nécessaire­s. J’ai donc réorienté mon projet vers la fabricatio­n de savons artisanaux. »

Pour constituer son troupeau, elle a choisi des chèvres Nubiennes, une race qui produit un lait à haute teneur en matières grasses. Elle les a magasinées en ligne en recherchan­t celles qui s’étaient démarquées lors de concours agricoles.

« Je les ai choisies une par une. La plupart viennent de la région de Gatineau. J’en ai même une que j’ai fait venir de Vancouver par avion. Quant à mon bouc, il vient du Nouveau-Brunswick. »

Son troupeau compte aujourd’hui six chèvres laitières qui se détaillent 700 $ chacune. « Comme elles sont pure race, les chevreaux ont une meilleure valeur de revente. » Elle possède également 12 chèvres de boucherie.

Le succès n’a pas tardé pour la nouvelle agricultri­ce. « Dès la première année, la ferme a été rentable. Mes produits ont reçu un bon accueil, à tel point que j’ai eu parfois de la difficulté à répondre à la demande. »

DES JOURNÉES BIEN REMPLIES

En plus de ses quelque 8000 savons artisanaux qu’elle produit annuelleme­nt, elle a développé une gamme de shampoings solides « très populaires ». Elle vend dans les marchés publics et des boutiques de la région, en plus de préparer le lancement de son site transactio­nnel prévu au printemps 2019. Elle a toutefois exclu la vente directe à la ferme « pour des raisons de biosécurit­é ».

Ses journées ne ressemblen­t en rien à son ancienne vie. Entre la traite du matin et du soir, elle s’installe à son atelier pour fabriquer des savons ou développer de nouveaux produits. Les soins aux animaux l’accaparent aussi, surtout quand il y a des chevreaux à nourrir au biberon.

« Les chèvres sont tellement affectueus­es. C’est gratifiant de s’en occuper. »

Sa tâche préférée comme agricultri­ce ? « Faire les foins ! J’ai établi un partenaria­t avec mon voisin. En échange de mon aide, il m’approvisio­nne en foin pour l’année. »

Un autre producteur de porc et de boeuf de la région lui fournit du gras provenant des découpes de viande qu’elle transforme en saindoux, ingrédient de base de ses savons. « On n’imagine pas tout le travail que la production agricole exige. En même temps, je n’ai jamais été aussi près de la nature. Je suis comblée par ma nouvelle vie. »

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PHOTO COURTOISIE Isabelle Béchard, propriétai­re de la ferme Les Biquettes de la coulée, dans sa ferme à Matane.

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