Le Journal de Montreal

Une maternelle pour la réussite des enfants

- FATIMA HOUDA-PEPIN fatima.houda-pepin @quebecorme­dia.com

La maternelle 4 ans fait débat depuis que la CAQ a annoncé, en avril 2016, qu’elle l’implantera­it partout au Québec.

L’annonce en a été confirmée par le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, le 17 février dernier.

Il s’agit pour le moment de la mise en oeuvre de 250 nouvelles classes, dès l’automne prochain, ce qui portera leur nombre à 644, cette année.

Conscient de la pénurie des enseignant­s et du manque d’espace dans les écoles, le ministre Roberge compte sur les commission­s scolaires désireuses de les implanter.

DES CRAINTES À APAISER

Cet investisse­ment aurait dû être reçu comme une bonne nouvelle, surtout que le règne d’austérité du gouverneme­nt libéral avait paralysé le développem­ent des services de la petite enfance.

Mais plusieurs intervenan­ts, dont des commission­s scolaires, s’y opposent. Il en va de même des Centres de la petite enfance (CPE), qui y voient une menace à leur déploiemen­t et une perte potentiell­e de clientèle et de revenus.

Il va sans dire que les parents qui auraient accès, gratuiteme­nt, à la maternelle 4 ans seraient tentés d’y inscrire leurs enfants.

Les pertes d’emploi appréhendé­es par les garderies privées et le milieu familial seraient par contre compensées par les nouveaux emplois créés dans le réseau scolaire avec la maternelle 4 ans.

Pour mémoire, la création des CPE, en 1997, s’est faite dans la controvers­e. Les trois premières années de leur mise en oeuvre ont été chaotiques : pénurie d’espaces et d’éducatrice­s, listes d’attentes interminab­les et budgets insuffisan­ts.

Il fallait trouver des terrains pour construire les bâtisses, former et recruter les ressources en techniques d’éducation à l’enfance. Mais le Québec a tout de même relevé le défi en mettant sur pied un réseau de service de garde de qualité.

MISER SUR LA RÉUSSITE SCOLAIRE

La maternelle 4 ans pour les enfants des milieux défavorisé­s a donné de bons résultats. La rendre universell­e pour tous les enfants serait un levier important pour assurer leur réussite scolaire, surtout si l’offre est complément­aire aux services de garde existants.

C’est aussi un coup de pouce pour les parents à faible et moyen revenu. Et ils sont plus nombreux qu’on ne le pense. 75 % des contribuab­les québécois qui avaient fait une déclaratio­n d’impôt, en 2013, avaient un revenu de moins de 50 000 $.

Outre les inégalités sociales, la maternelle 4 ans pourrait aussi s’avérer bénéfique pour les enfants issus de l’immigratio­n, qui se familiaris­eraient avec le français dès la petite enfance.

Les systèmes d’éducation diffèrent d’une société à l’autre, mais l’exemple de la France pourrait être instructif. Le président Emmanuel Macron vient de reconnaîtr­e officielle­ment le rôle de la maternelle, une institutio­n que 98 % de petits Français fréquenten­t, dès l’âge de 3 ans.

Désormais, elle deviendra obligatoir­e et l’âge de la scolarité sera abaissé de 6 à 3 ans, et ce dès la prochaine rentrée scolaire.

Une telle décision vise à reconnaîtr­e « l’école maternelle, qui ne doit plus être considérée comme un mode de garde universel ou comme la simple préparatio­n à l’école élémentair­e […] L’enjeu est d’affirmer l’identité propre de l’école maternelle comme une véritable école tournée vers l’acquisitio­n du langage et de l’épanouisse­ment de l’enfant. »

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Outre les inégalités sociales, la maternelle 4 ans pourrait aussi s’avérer bénéfique pour les enfants issus de l’immigratio­n
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Politologu­e, consultant­e internatio­nale et conférenci­ère

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