Bombardier chute de 15 % en Bourse
Des retards dans des livraisons de trains continuent de coûter cher à la multinationale québécoise
Pour la deuxième fois en moins de six mois, le grand patron de Bombardier, Alain Bellemare, a réservé de mauvaises surprises aux investisseurs hier, ce qui porte un nouveau coup à sa crédibilité.
Une semaine avant la tenue de son assemblée annuelle des actionnaires, la multinationale québécoise a annoncé que ses revenus atteindraient 17 milliards $ US en 2019, soit un milliard $ US de moins que prévu.
Les marchés ont mal accueilli la nouvelle : l’action de Bombardier a perdu 15 % hier pour clôturer à 2,48 $ à la Bourse de Toronto.
La moitié du manque à gagner, soit 500 M$ US, est attribuable à des retards chez Bombardier Transport, la division ferroviaire.
Les livraisons de trains ont été suspendues sur deux contrats majeurs : celui du Crossrail à Londres et celui des Chemins de fer fédéraux suisses (CFF). Dans le premier cas, le problème est lié au client, alors que dans le second, c’est un manque de fiabilité des rames qui est en cause.
Pris ensemble, deux autres éléments auront un impact négatif additionnel de 500 M$ US sur le chiffre d’affaires : des taux de change défavorables pour Bombardier Transport et la cession plus hâtive que prévu du programme d’avions Q400 à Viking Air (au plus tard en juin plutôt qu’en septembre).
MOINS DE PROFITS
Les profits seront eux aussi moins reluisants. Le bénéfice d’exploitation ajusté de Bombardier ne dépassera pas 1,65 G$ US pour l’année, soit 8 % de moins que prévu.
L’analyste Walter Spracklin de RBC s’est désolé de ce nouveau « pas en arrière », qui survient moins de cinq mois après la publication par Bombardier de ses prévisions pour 2019.
Rappelons qu’en novembre, l’action de Bombardier avait chuté de 25 % après l’annonce du licenciement de 5000 salariés et le dévoilement d’un trou de 600 M$ US dans les liquidités à cause de contrats ferroviaires, dont ceux du Crossrail et des CFF.
Interrogé par Le Journal hier, le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, a évoqué l’octroi de nouveaux contrats à Bombardier Transport.
« C’est sûr qu’il faut donner des commandes à [l’usine de] La Pocatière parce que le manque de produits va causer des problématiques sur le plan de la profitabilité, mais il est prématuré de tirer des conclusions », a-t-il déclaré.
PAS DE NOUVELLES MISES À PIED
De son côté, l’analyste Cameron Doerksen, de la Banque Nationale, maintient sa confiance à l’égard de la direction.
« La réduction des prévisions annuelles et les problèmes persistants dans plusieurs contrats ferroviaires sont à l’évidence décevants, mais nous continuons de croire que ces défis seront largement résolus cette année », a-t-il écrit dans une note.
Olivier Marcil, vice-président aux relations externes chez Bombardier, a assuré hier au Journal que la baisse des revenus et des profits n’entraînerait pas de nouvelles mises à pied.
Il faudra voir quel impact ce nouveau faux pas aura sur la rémunération des hauts dirigeants de l’entreprise.
L’an dernier, ceux-ci ont renoncé à une partie de leurs primes en argent, en raison du trou de 600 M$ US. Leur rémunération avait reculé de 4 % par rapport à 2017, mais avait tout de même totalisé 38 M$.
Notons que la mauvaise performance boursière de Bombardier affecte moins ses grands patrons qu’elle n’aurait pu le faire si ceux-ci n’avaient pas vendu d’importants blocs d’actions, l’an dernier.
En effet, 12 dirigeants ont réalisé des gains de plus de 38 M$ en exerçant des options d’achat d’actions, dont 10,6 M$ pour M. Bellemare. La plupart des actions ont été vendues à un prix unitaire de 4,55 $ ou plus.