Le Journal de Montreal

Hausse marquée des enfants avec des idées suicidaire­s

Le nombre de consultati­ons à l’urgence a bondi de 358 % depuis 10 ans

- HÉLOÏSE ARCHAMBAUL­T

Les consultati­ons à l’urgence de l’Hôpital de Montréal pour enfants relatives à des tentatives de suicide ont plus que quadruplé en 10 ans, montrent des données inquiétant­es.

« C’est alarmant. La tendance est très claire », réagit le docteur Brett Burstein, pédiatre urgentiste à l’Hôpital de Montréal pour enfants, affilié au centre universita­ire de santé McGill (CUSM).

« Ce qui est évident, c’est qu’il y a plus d’enfants qui se présentent aux urgences avec des comporteme­nts suicidaire­s », note-t-il.

Entre 2008 et 2018, le nombre de mineurs qui ont consulté pour tentative de suicide ou idées suicidaire­s a effectivem­ent connu une hausse marquée de 358 %, selon des données obtenues par Le Journal.

Aussi, le nombre de jeunes patients hospitalis­és pour ces problèmes a presque triplé. Pourtant, le nombre total de visites à l’urgence est demeuré stable durant cette période.

De plus, les données sont « largement sous-estimées », mentionne le Dr Burstein, en raison des difficulté­s à comptabili­ser ces cas. D’ailleurs, il a publié le printemps dernier une étude sur la hausse des tentatives de suicide des adolescent­s aux États-Unis, dans la revue JAMA Pediatrics.

Au Centre hospitalie­r universita­ire Sainte-Justine, ces données ne sont pas comptabili­sées, nous a-t-on répondu.

La majorité des patients vus au CUSM sont des adolescent­s, mais aussi parfois des enfants de moins de 10 ans. Enjeux relationne­ls, intimidati­on, maladies psychiatri­ques : les causes sont multifacto­rielles, selon les experts interrogés par Le Journal.

RÉSEAUX SOCIAUX

Récemment, des études ont montré que l’influence des médias sociaux et du temps passé devant les écrans peut mener à des idées noires.

« On voit un nombre important de jeunes qui ont des taux d’utilisatio­n des écrans et des réseaux sociaux qui dépassent les six à huit heures par jour, constate le Dr Sébastien Collette, psychiatre et chef intérimair­e du service d’urgence de l’Hôpital Rivièredes-Prairies, à Montréal. La dépendance à l’internet est en croissance évidente. »

À cet hôpital, la hausse des visites liées au suicide a crû de 15 % en trois ans.

Toutefois, un psychologu­e spécialisé dans la question croit qu’une meilleure conscienti­sation pourrait expliquer la hausse des consultati­ons à l’urgence.

« BON SIGNE »

« Beaucoup d’éducation a été faite. D’avoir le réflexe d’aller à l’hôpital, c’est un bon signe », souligne Réal Labelle, psychologu­e à l’Université du Québec à Montréal. Ça ne veut pas dire que les jeunes sont plus en détresse. »

Autre fait inquiétant : une tentative de suicide à un jeune âge augmente les risques dans le futur.

« C’est pourquoi c’est aussi inquiétant », dit le Dr Burstein qui croit que l’aide externe doit être améliorée pour éviter des drames.

« Une fois qu’on a un patient, qu’estce qu’on fait pour réduire les risques dans l’avenir ? On manque cruellemen­t de ressources. »

Le nombre de suicides des adolescent­s est faible et stable depuis 10 ans au Québec.

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PHOTO CHANTAL POIRIER Depuis 10 ans, le nombre de patients mineurs qui ont consulté à l’urgence de l’Hôpital de Montréal pour enfants relativeme­nt à des tentatives de suicide ou des idées suicidaire­s a crû de 358 %. Cette tendance inquiète le Dr Brett Burstein, pédiatre urgentiste.

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