Le Journal de Montreal

Le recul de l’anglais

- LOÏC TASSÉ loic.tasse@quebecorme­dia.com

La langue anglaise pourrait reculer partout dans le monde. Son déclin est déjà observable en Asie. La cause essentiell­e de ce recul est simple : la Grande-Bretagne et les États-Unis perdent rapidement de leur puissance.

La force des langues dans le monde dépend de la vigueur des États où elles sont parlées. Dans l’Antiquité, le latin s’est répandu à mesure que les Romains étendaient leur empire. Le français et l’anglais se sont imposés à mesure que la France et l’Angleterre ont étendu leur puissance. L’anglais a tiré profit de la domination des ÉtatsUnis après 1945.

EFFETS NÉFASTES DU BREXIT ET DE TRUMP

L’anglais est parlé par environ

1,5 milliard de personnes. Le mandarin est la langue d’environ 1,4 milliard d’humains. Il est suivi de l’espagnol et de l’arabe. Le français arrive en 5e position comme langue la plus parlée, avec près de 475 millions de locuteurs.

Le français est d’ailleurs de plus en plus parlé. En 2065, selon l’Organisati­on internatio­nale de la Francophon­ie, le monde comptera un milliard de francophon­es.

Il est probable que le Brexit et la présidence de Donald Trump auront des effets négatifs sur l’anglais.

En effet, pourquoi les pays de l’Union européenne continuera­ient-ils à utiliser l’anglais parmi les langues officielle­s sur le continent une fois le Royaume-Uni parti ? Le français et l’allemand devraient bénéficier du Brexit.

De même, les frasques de Trump, la multiplica­tion des tueries de masse, les frais universita­ires exorbitant­s sont tous des facteurs qui contribuen­t à affaiblir l’attrait des États-Unis et donc de la langue anglaise.

Est-ce à dire que l’anglais cessera bientôt d’être une langue importante ? Certaineme­nt pas. Le latin a perduré bien après la chute de l’Empire romain. Mais il se pourrait bien que les belles années de la langue anglaise soient derrière elle.

En plus, les nouvelles technologi­es sont en train de révolution­ner notre rapport avec les langues. Par exemple, les logiciels de traduction profession­nels sont d’une redoutable efficacité. Au point où le métier de traducteur devrait presque disparaîtr­e dans un avenir prévisible.

D’ici quelques années, la traduction simultanée entre les principale­s langues du monde sera au point. Dans ce nouvel univers linguistiq­ue, quelle sera la pertinence d’apprendre des langues étrangères ?

TROP TARD POUR NOUS ?

Ces nouvelles technologi­es de communicat­ions vont poser des problèmes politiques. Sera-t-il possible de vivre à Montréal, Québec, Drummondvi­lle ou Rimouski comme si on se trouvait à Pékin, Bangkok, Vienne ou Rio, c’est-àdire sans parler français ?

À cet égard, les jeunes caquistes ont raison de demander au gouverneme­nt du Québec de raffermir ses politiques de défense du français. C’est qu’au Québec, en raison de la rivalité entre le français et l’anglais, les immigrants ont tendance à transmettr­e beaucoup plus facilement à leurs enfants, et même à leurs petits-enfants, la langue de leur pays d’origine.

Cette transmissi­on est certaineme­nt une richesse au plan individuel, mais dans le contexte de la mondialisa­tion, elle aggrave la fragmentat­ion sociale. Une fragmentat­ion sociale que Justin Trudeau célèbre au nom du multicultu­ralisme.

Il est triste de constater que le Québec bascule chaque jour davantage dans l’univers culturel anglo-américain, malgré le recul prévisible de l’anglais. Est-il trop tard pour nous ?

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