Le Journal de Montreal

Un maire cassé comme un clou

Le maire de Beauharnoi­s, Bruno Tremblay, estime que la Ville est au bord du gouffre financier et demande l’aide de Québec.

- SARAH-MAUDE LEFEBVRE

« […] C’EST ACTUELLEME­NT, UN APPEL À L’AIDE JE SUIS OBLIGÉ DE ROULER LA VILLE AU QUOTIDIEN SUR UNE MARGE DE CRÉDIT [...| POUR FAIRE LES PAIES. » – Bruno Tremblay, maire de Beauharnoi­s

Des employés municipaux payés à même la marge de crédit, un trou de plusieurs millions de dollars dans les coffres, un budget qui explose ; rien ne va plus à Beauharnoi­s. Son maire appelle Québec à l’aide.

Au cours des derniers mois, notre Bureau d’enquête a récolté plusieurs informatio­ns troublante­s sur la gestion de cette ville de la Montérégie d’un peu plus de 12 000 habitants.

Le maire de Beauharnoi­s, Bruno Tremblay, ne s’en cache pas. Selon celui qui est arrivé en poste en novembre 2017, la ville est au bord du gouffre. Les états financiers de l’année 2018, rendus publics hier, indiquent que la ville doit gérer un déficit de plus de 1,5 M$ ainsi qu’un redresseme­nt à faire de l’ordre de 7,9 M$. Un montant énorme pour cette ville qui dispose d’un budget annuel d’environ 25 M$.

Face à cette situation, et avec des remboursem­ents de prêts à venir au cours des prochaines années, il y a « urgence d’agir », selon le maire Tremblay, qui presse Québec d’intervenir et de mettre le nez dans les finances de Beauharnoi­s.

ROULER SUR LA MARGE DE CRÉDIT

« C’est un appel à l’aide […] Actuelleme­nt, je suis obligé de rouler la ville au quotidien sur une marge de crédit. Pour faire les paies, je suis sur la marge de crédit […] On n’a plus de liquidités. J’ai un versement de taxe qui va rentrer au mois de septembre et nous donner de l’oxygène. Mais c’est quasiment le supplice de la goutte », a indiqué ce dernier en entrevue avec notre Bureau d’enquête.

La situation ne date pas d’hier. Selon lui, la ville vend des actifs hypothéqué­s chaque année depuis cinq ans. Depuis son élection, il dit avoir découvert que l’argent ainsi récolté sert à boucler le budget de la ville plutôt qu’à rembourser les prêts en cours. Pendant ce temps, le fardeau financier de Beauharnoi­s s’alourdit, dit-il.

COUPER DES SERVICES

Si cela perdure, le maire estime qu’il devra effectuer des « coupures drastiques » dans les services. Déjà, les citoyens ont dû composer avec une hausse de taxes de 15 % cette année.

Selon les documents consultés par notre Bureau d’enquête, les dépenses de Beauharnoi­s ont doublé de 2013 à 2016, passant de 17 M$ à 30 M$. La dette a aussi triplé de 17 M$ à 52 M$.

Pour prouver à la population que l’heure est grave, le maire Tremblay souhaite que le ministère des Affaires municipale­s (MAMH) vienne lui-même analyser les états financiers de la ville.

« Il faut que le ministère dise que la récréation est finie », dit ce dernier, qui souhaite obtenir l’autorisati­on de Québec pour aller chercher un prêt afin de consolider les dettes de la ville.

« Je n’ai pas le choix. Si demain je dois couper dans les services de la ville, je vais avoir un sérieux problème. Lesquels va-t-on couper ? Fermer l’aréna ? Ramasser la neige aux deux jours ? Ce sont toutes des choses qui n’ont pas d’allure », s’inquiète-t-il.

La ville affirme que ses appels à l’aide sont ignorés par le MAMH, ce que le ministère nie.

« C’est toujours lettre morte. Attendez-vous qu’on soit comme Chambly [mise sous tutelle] avant d’intervenir ? Moi, je vous dis de venir le faire avant. Venez mettre les pendules à l’heure », demande le maire.

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PHOTO MARTIN CHEVALIER Le maire de Beauharnoi­s Bruno Tremblay affirme que sa ville est au bord du gouffre financier et qu’il a découvert plusieurs éléments problémati­ques dans le budget depuis son arrivée en poste à la fin de l’année 2017.

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