Le Journal de Montreal

330 pneus retirés d’une rivière

Les particules de caoutchouc se libèrent lentement dans l’eau

- JONATHAN TREMBLAY

Des citoyens des Laurentide­s ont repêché pas moins de 330 vieux pneus qui jonchaient la rivière du Nord... et ce n’est pas encore fini.

« C’est scandaleux ! Une situation que je n’ai jamais vue. C’est surprenant de voir un dépotoir [improvisé] de la sorte, déplore Alain Saladzius, président du conseil d’administra­tion de Fondation Rivières. C’est une pollution, une nuisance physique comme le plastique. »

Dégoûtés, une trentaine de bénévoles de Saint-Jérôme se sont mobilisés samedi pour nettoyer la rivière.

« On a vu qu’il y avait beaucoup de pneus, et que personne ne faisait rien. Alors, on l’a fait », a raconté l’initiateur du projet, Benoît Girouard, 43 ans, organisé par le centre d’entraîneme­nt Gym X.

Ils ont recueilli 330 pneus en à peine quatre heures sur une distance d’environ 400 m.

Une vidéo de leur geste a récolté plus de 100 000 visionneme­nts sur Facebook depuis. L’an dernier, ils avaient tenté l’expérience une première fois, extirpant à cette occasion 93 pneus. Et ils recommence­ront en septembre.

Difficile de savoir d’où ils viennent, selon M. Girouard. Il croit que le courant a pu en transporte­r plusieurs.

JUSQU’À 50 ANS

Certains, érodés par le temps, dateraient de plus de 10, 15 ans et même 50 ans, à son avis. En cinq minutes hier, Le Journal en a découvert cinq autres, encore ensevelis, dans le coin scruté par le groupe.

Cette situation désole le PDG du concession­naire Léveillé Ford, situé à proximité. Samuel Léveillé a d’ailleurs participé au ramassage.

« J’avais l’impression de ramasser les déchets de mes ancêtres, dit-il. C’est sûr que ça provient en partie d’anciens propriétai­res [du concession­naire] qui n’étaient pas conscienti­sés à l’époque. On ne peut pas leur en vouloir. Ce qui me choque, c’est ceux qui [feraient] encore ça aujourd’hui. »

« C’est choquant, seconde Barry Husk, président

de BlueLeaf, une firme en environnem­ent. Ç’a diminué avec le temps, mais il y a de ça une génération, le monde jetait à l’eau tout ce qu’on peut imaginer. »

Depuis 1999, le nombre de pneus usagés jetés n’importe où a chuté après la création d’un programme qui se charge de les récupérer, moyennant des frais de 3 $ à l’achat de chaque pneu au Québec.

POLLUTION LENTE

Trouver des pneus dans l’eau est toutefois un phénomène encore bien actuel, même si en trouver 330 est exceptionn­el.

Au début du mois, une trentaine avaient été récupérés dans la rivière Rouge, à Brébeuf. Une cinquantai­ne avaient aussi été extirpés du lac Saint-François, à Saint-Zotique, début juin.

« C’est beaucoup, se désole Sébastien Sauvé, professeur en chimie environnem­entale à l’Université de Montréal. Ça va prendre des décennies à se dégrader. Ça pollue l’environnem­ent visuel, mais aussi chimiqueme­nt, avec les petites particules qui s’en détachent. »

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PHOTO JONATHAN TREMBLAY Quelques-uns des pneus ramassés depuis samedi dans la rivière du Nord, à Saint-Jérôme.
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PHOTO JONATHAN TREMBLAY Benoît Girouard, 43 ans, a instauré la cueillette.

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