Le Journal de Montreal

L’Allier se livre dans ses mémoires

L’ancien maire de Québec revient sur ses années en politique et sur les impacts sur sa famille

- STÉPHANIE MARTIN

QUÉBEC | Jean-Paul L’Allier a eu une vie bien remplie et épanouie, mais concilier la famille et la politique a été difficile, révèle l’ancien ministre et maire de Québec, qui se livre comme jamais dans ses mémoires inachevés, publiés trois ans après son décès.

Quelques années avant sa mort en janvier 2016, Jean-Paul L’Allier a entrepris de rassembler ses souvenirs et ses réflexions sur sa vie, ses engagement­s politiques, sa carrière, sa famille. C’est sa femme qui l’a incité à le faire.

Maintenant veuve, Johanne Mongeau, aidée de l’historien et bibliothéc­aire Gilles Gallichan, a réuni ses mémoires ainsi que divers documents d’archives, dont sa dernière entrevue accordée à Radio-Canada, deux mois avant son décès.

Intitulé Le Relais, le livre qui en découle paraîtra le 10 septembre. Jean-Paul L’Allier s’y livre de façon franche. « Il s’ouvre dans ce livre-là comme il ne l’a jamais fait », souligne Johanne Mongeau, notamment sur sa famille.

Après presque sept ans en politique provincial­e et une défaite électorale en 1976, il a une conversati­on avec son fils Jean-Christophe, 11 ans.

Le jeune lui demande ce qu’il va faire après avoir perdu son emploi de député et de ministre. Quand il lui dit qu’il retournera­it travailler comme avocat, Jean-Christophe rétorque : « Je ne savais pas que tu étais avocat. »

« Quand ton fils, après sept ans, ne sait pas qui tu es sur le plan profession­nel parce que la politique a tout caché, la politique t’a empêché d’avoir cette communicat­ion, c’est un prix très élevé à payer », écrit L’Allier.

DURE DÉFAITE

« Après une défaite électorale, on retrouve ses enfants, mais on est devenu, d’une certaine façon, un étranger qui habite leur environnem­ent. »

Sa séparation d’avec sa première épouse, raconte-t-il, a été causée par l’éloignemen­t imposé par la politique. « Pour les enfants, j’imagine que ç’a été assez dur. Je le regrette toujours parce qu’on se sent un peu coupable, mais en même temps, on ne peut rien y changer. »

La chute, en politique, peut être très dure, exprime-t-il.

« Quand tu te fais battre, c’est comme débouler un escalier sur le dos. Au lendemain d’une défaite électorale, le téléphone ne sonne plus. C’est le silence, et seuls vos vrais amis, moins d’une dizaine de personnes, cherchent votre compagnie pour échanger sur ce qui s’est passé. »

Sa famille n’a pas été épargnée lors de l’épisode de la prostituti­on juvénile, alors que de fausses rumeurs laissaient entendre que le maire ait pu être impliqué. « Cette histoire a été dure pour la famille.

DÉRACINÉ

Il raconte aussi comment il a été coupé de sa propre famille quand, comme plusieurs enfants des campagnes, il est devenu pensionnai­re, car ses parents voulaient lui permettre de mener des études.

« Leurs sacrifices eurent cependant pour conséquenc­e que la famille naturelle s’est finalement disloquée parce que nous sommes tous devenus pensionnai­res. […] Mes parents me visitaient le dimanche, m’apportaien­t des gâteries de la maison, mais ils étaient davantage mes pourvoyeur­s que mes éducateurs, qui étaient mes professeur­s. C’était comme cela pour tous mes amis. Nos racines se rempotaien­t ailleurs. »

LUTTES ET COMBATS

De la crise d’Octobre aux chicanes de clocher entre les villes de l’agglomérat­ion de Québec, en passant par les relations tendues avec Ottawa et son engagement pour la culture, dans le style coloré qu’on lui connaît, l’ancien maire raconte ses souvenirs, ne manquant pas d’écorcher certaines personnali­tés comme la mairesse de Sainte-Foy Andrée Boucher ou le maire de Lévis Jean Garon.

La plupart de ses notes ont été enregistré­es, puis couchées sur papier par son adjointe. « C’est ce que je trouve bouleversa­nt là-dedans, exprime Johanne Mongeau. C’est qu’on dirait qu’on est en train de lui parler, dans son bureau ou autour d’un verre de vin. C’est très vivant et très émouvant en même temps. »

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PHOTO D’ARCHIVES Jean-Paul L’Allier en novembre 1996, à Québec.
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LE RELAIS – MÉMOIRES INACHEVÉS Jean-Paul L’Allier Parution le 10 septembre Éditions Septentrio­n

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