Soupçonnés d’être des agents d’immigration illicite
Deux Montréalais font l’objet d’une enquête de l’Agence des services frontaliers
Deux Montréalais soupçonnés de s’être fait passer pour des conseillers en immigration auprès de nounous étrangères sont sous la loupe de l’Agence des services frontaliers du Canada, qui a perquisitionné leurs locaux, en juillet.
Shirley Baltazar et Sebastian Alakkattussery sont soupçonnés d’avoir fourni pendant des années des services de conseiller en immigration sans les autorisations requises, moyennant d’importantes rétributions.
Cinq des 15 femmes interviewées par notre Bureau d’enquête dans le cadre du grand reportage Piégées ont allégué que Mme Baltazar leur avait demandé des milliers de dollars pour des services d’immigration qui n’ont jamais abouti.
Trois semaines après avoir été interpellée par des courriels de notre équipe, l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) a perquisitionné les bureaux de Shirley Baltazar et de son prétendu collègue, Sebastian Alakkattussery, indiquent des documents judiciaires.
L’ASFC croit que les deux collaborateurs « s’impliquent de façon illicite dans les demandes de statut [...] de ces travailleurs » et qu’ils demandent de l’argent pour des services d’immigration qui ne sont pas toujours rendus. Selon la dénonciation de l’ASFC, ceci aurait des répercussions importantes.
BEAUCOUP D’ARGENT
À l’aide de dossiers judiciaires et de témoignages recueillis, notre équipe a réussi à dresser une liste d’une quarantaine de présumées victimes, qui ont réclamé un total de près de 400 000 $ à Mme Baltazar ou à son agence, S.B. International, dans la dernière décennie.
Plusieurs femmes disaient avoir porté plainte aux autorités, sans trop de suivi.
Une travailleuse domestique ayant fait affaire avec Mme Baltazar dans la dernière année a rapporté s’être retrouvée sans statut après que cette dernière aurait bousillé son dossier d’immigration.
« C’est le point le plus bas de ma vie, raconte-t-elle, sous le couvert de l’anonymat par peur de se faire expulser du pays. C’était mon rêve de venir ici et je risque de tout perdre. »
Lors d’une brève rencontre avec notre Bureau d’enquête dans son appartement aménagé en bureau, Shirley Baltazar a assuré qu’elle avait cessé de faire du travail d’immigration rémunéré en 2014, contredisant les témoignages recueillis et les documents de l’ASFC.
QUI DIT VRAI ?
Mme Baltazar a déclaré qu’elle travaille maintenant chez Diva International, l’agence de Sébastien Alakkattussery.
Mais au téléphone, ce dernier a dit qu’il ne travaille plus avec Shirley Baltazar « depuis longtemps », et a insisté sur le fait qu’il n’avait « aucune idée » des allégations portées contre sa prétendue collègue.
Shirley Baltazar reconnaît cependant devoir de l’argent à plusieurs personnes.
« Oui, oui, je veux les rembourser. Mais elles doivent me donner une chance ! », nous a-t-elle dit, expliquant qu’elle a de nombreuses dettes à payer. « Une par une, je vais le faire, sincèrement. »
En 2018, Sebastian Alakkattussery a été trouvé coupable d’avoir exercé illégalement la fonction d’avocat. Il a été condamné à payer une amende de 2600 $.