Faire peur est loin d’être un travail de tout repos
Les acteurs de Malefycia répètent les mêmes gestes des dizaines de fois par soir
Une Blanche Neige punk métal, une Petite Sirène rouge aux dents effilées, un Pinocchio démoniaque et une Cruella directrice d’abattoir font partie des personnages de conte revisités et grotesquement pervertis par le théâtre immersif Malefycia, qui est de retour cette année.
Installée le temps de l’Halloween dans l’ancien Drugstore au coeur du Village gai, cette maison de l’horreur plonge ses clients dans une vingtaine de scénarios cauchemardesques répartis le long d’un labyrinthe.
En reprenant de 50 à 200 fois par nuit leurs numéros, la plupart des acteurs hurlent et se démènent jusqu’à la limite de leurs forces.
Chez Malefycia, chaque microreprésentation dure environ trois minutes, et la soirée peut s’étirer de 18 h à 1 h.
« Ça permet d’exorciser ses vieux démons ! » commente Dominique
Arganese, la co-conceptrice de l’événement, lorsqu’on lui parle de l’aspect incroyablement répétitif, quasiment autohypnotique, du travail de ceux qui font peur.
La salle de maquillage bourdonnait d’activité lorsque le 24 heures a interrogé quelques marathoniens de l’horreur.
UN MENTAL D’ACIER
« Ça donne de l’adrénaline, faire peur au monde, mais ça prend un mental d’acier », explique Mathieu Laroche, un vétéran de Malefycia qui joue Pinocchio cette année.
« J’essaie de prendre chaque visiteur à part pour le faire frissonner d’une manière qu’il n’oubliera jamais, c’est un défi que je me donne à chaque prise », poursuit-il.
On comprend que Malefycia s’adresse aux 18 ans et plus et dépeint une galerie d’atrocités physiques et morales. Âmes et coeurs sensibles s’abstenir si la perspective de se faire asperger de matière visqueuse ou de respirer des odeurs nauséabondes ne vous dissuade pas.
« J’ai du mal à sortir de mon rôle une fois la soirée terminée ! » avoue Matthieu Girard, qui incarne une des affreuses soeurs de Cendrillon.
La « petite sirène » Mylène Lefebvre-Lavallée a eu un début de saison particulièrement éprouvant. « Je baignais nue dans une sorte de glu toute la soirée pendant la première représentation, j’avais super froid ! », se souvient-elle.
FINI LA BAIGNOIRE
Pour lui éviter de claquer des dents, la mise en scène l’a depuis retirée de sa baignoire. Munie d’une queue de poisson en guise de seul vêtement, Mme Lefebvre-Lavallée exécute une chorégraphie sur une chanson diffusée en boucle probablement 200 fois par nuit.
« On se demande si on va tenir le coup et, à force de refaire le numéro, on a un regain d’énergie nerveuse qui nous rend encore plus terrifiants », dit Alexandra Cohen, qui revêt les habits de Cruella.
« À une heure du matin, quand c’est fini, la bière est bonne, dit Pinocchio. Mais on va vite au lit parce que ça recommence le lendemain. »