Le Journal de Montreal

Faire peur est loin d’être un travail de tout repos

Les acteurs de Malefycia répètent les mêmes gestes des dizaines de fois par soir

- LOUIS-PHILIPPE MESSIER

Une Blanche Neige punk métal, une Petite Sirène rouge aux dents effilées, un Pinocchio démoniaque et une Cruella directrice d’abattoir font partie des personnage­s de conte revisités et grotesquem­ent pervertis par le théâtre immersif Malefycia, qui est de retour cette année.

Installée le temps de l’Halloween dans l’ancien Drugstore au coeur du Village gai, cette maison de l’horreur plonge ses clients dans une vingtaine de scénarios cauchemard­esques répartis le long d’un labyrinthe.

En reprenant de 50 à 200 fois par nuit leurs numéros, la plupart des acteurs hurlent et se démènent jusqu’à la limite de leurs forces.

Chez Malefycia, chaque microrepré­sentation dure environ trois minutes, et la soirée peut s’étirer de 18 h à 1 h.

« Ça permet d’exorciser ses vieux démons ! » commente Dominique

Arganese, la co-conceptric­e de l’événement, lorsqu’on lui parle de l’aspect incroyable­ment répétitif, quasiment autohypnot­ique, du travail de ceux qui font peur.

La salle de maquillage bourdonnai­t d’activité lorsque le 24 heures a interrogé quelques marathonie­ns de l’horreur.

UN MENTAL D’ACIER

« Ça donne de l’adrénaline, faire peur au monde, mais ça prend un mental d’acier », explique Mathieu Laroche, un vétéran de Malefycia qui joue Pinocchio cette année.

« J’essaie de prendre chaque visiteur à part pour le faire frissonner d’une manière qu’il n’oubliera jamais, c’est un défi que je me donne à chaque prise », poursuit-il.

On comprend que Malefycia s’adresse aux 18 ans et plus et dépeint une galerie d’atrocités physiques et morales. Âmes et coeurs sensibles s’abstenir si la perspectiv­e de se faire asperger de matière visqueuse ou de respirer des odeurs nauséabond­es ne vous dissuade pas.

« J’ai du mal à sortir de mon rôle une fois la soirée terminée ! » avoue Matthieu Girard, qui incarne une des affreuses soeurs de Cendrillon.

La « petite sirène » Mylène Lefebvre-Lavallée a eu un début de saison particuliè­rement éprouvant. « Je baignais nue dans une sorte de glu toute la soirée pendant la première représenta­tion, j’avais super froid ! », se souvient-elle.

FINI LA BAIGNOIRE

Pour lui éviter de claquer des dents, la mise en scène l’a depuis retirée de sa baignoire. Munie d’une queue de poisson en guise de seul vêtement, Mme Lefebvre-Lavallée exécute une chorégraph­ie sur une chanson diffusée en boucle probableme­nt 200 fois par nuit.

« On se demande si on va tenir le coup et, à force de refaire le numéro, on a un regain d’énergie nerveuse qui nous rend encore plus terrifiant­s », dit Alexandra Cohen, qui revêt les habits de Cruella.

« À une heure du matin, quand c’est fini, la bière est bonne, dit Pinocchio. Mais on va vite au lit parce que ça recommence le lendemain. »

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PHOTO COURTOISIE GGG Blanche Neige punk, sirène démoniaque, Cruella directrice d’abattoir et Pinocchio thrash font partie des personnage­s de Malefycia.

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