Le Journal de Montreal

PAS DE MENOTTES POUR FRANCO FAVA

L’ex-collecteur de fonds du PLQ s’attendait pourtant à se faire arrêter

- ALEXANDRE ROBILLARD ET FÉLIX SÉGUIN

Un des principaux suspects dans une retentissa­nte affaire de fraude immobilièr­e alléguée, l’ancien collecteur de fonds libéral Franco Fava, s’attendait déjà, il y a quatre ans, à se retrouver « les menottes » aux poignets.

Mais ça ne s’est jamais produit. L’Unité permanente anticorrup­tion (UPAC) a entre les mains des informatio­ns démontrant que Franco Fava s’attendait, en 2015, à être arrêté.

« Au pire, c’est moi qui serai accusé. C’est du criminel, les menottes dans le dos avec un esti de show médiatique. Au pire, je paierai de l’impôt », affirmait-il à d’autres suspects avec qui il était attablé dans un restaurant de Québec, selon la police.

Tous étaient ciblés par le projet policier « Justesse », nom de code donné à une enquête amorcée en 2011 concernant des transactio­ns immobilièr­es douteuses faites en 2004 et en 2007 par la Société immobilièr­e du Québec (SIQ), l’organisme qui gère les immeubles et les baux du gouverneme­nt du Québec.

Franco Fava et deux autres ex-organisate­urs du Parti libéral du Québec, William Bartlett et Charles Rondeau, sont au nombre des suspects, tout comme l’ex-patron de la SIQ, Marc-André Fortier.

L’UPAC soupçonne qu’ils ont commis une fraude qui leur a permis d’empocher des commission­s secrètes de plus de 2 millions $ « dans le cadre de la vente de bâtisses et de locations à long terme ».

Les confidence­s de Franco Fava à ses proches sont révélées dans le livre PLQ inc. de notre Bureau d’enquête, en librairie depuis le début de la semaine.

DES PRÉCAUTION­S

Rendu public pour la première fois par un reportage de Radio-Canada diffusé en novembre 2016, le travail des enquêteurs dans ce dossier était déjà connu des principaux suspects.

Dès mai 2015, Fava et Bartlett multipliai­ent les précaution­s pour éviter les oreilles indiscrète­s quand ils se rencontrai­ent. À au moins une occasion, ils ont notamment choisi de se réfugier sur les verts d’un terrain de golf.

Fava aurait également tenté de faire disparaîtr­e des traces de transactio­ns sur un compte en Autriche, où les policiers soupçonnen­t que les suspects ont caché des commission­s secrètes.

L’UPAC dispose de documents montrant d’ailleurs que Fava voulait se rendre à Vienne, avec Rondeau, pour fermer des comptes bancaires, à la fin de l’été 2015.

En novembre 2016, au moment de la diffusion du reportage de Radio-Canada à leur sujet, trois des quatre principaux suspects avaient nié toute malversati­on. Charles Rondeau était le seul à ne pas avoir émis de commentair­e.

À L’HÔPITAL

Dans une entrevue à notre Bureau d’enquête au cours des dernières semaines, Charles Rondeau a brièvement réagi aux allégation­s concernant les commission­s secrètes.

« Je n’ai pas reçu d’argent », a-t-il dit, en ajoutant ne pas avoir rencontré d’enquêteurs de l’UPAC.

Celui-ci a ajouté avoir des ennuis de santé. « Je suis en examen, je sors de l’hôpital, j’y retourne la semaine prochaine », a-t-il dit.

Jusqu’ici, aucun des suspects n’a été arrêté. L’an dernier, notre Bureau d’enquête a révélé que les policiers avaient dû reporter trois fois la date prévue pour procéder à des arrestatio­ns.

Les autorités attribuaie­nt ces reports à un manque de collaborat­ion de la justice. La direction de l’UPAC avait ensuite admis que l’échéancier avait été « modifié », tout en niant un report des arrestatio­ns.

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PHOTO D’ARCHIVES, JEAN-FRANÇOIS DESGAGNÉS L’ex-collecteur de fonds libéral Franco Fava avait comparu à la commission Bastarache sur le processus de nomination des juges.
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Organisate­ur libéral
CHARLES RONDEAU Organisate­ur libéral

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