Le Journal de Montreal

Défendre l’indéfendab­le

- PIERRE MARTIN @PMartin_UdeM

C’est le lourd fardeau que devront porter les républicai­ns du Congrès s’ils souhaitent sauver leur président de la destitutio­n. Lui sacrifiero­nt-ils leur avenir politique et leur conscience ?

Les faits sont déjà clairs. Donald Trump a abusé de son pouvoir en cherchant à transiger l’aide militaire à l’Ukraine contre une promesse de ses dirigeants de nuire à Joe Biden. Il a ensuite cherché à dissimuler ces actions et à entraver le travail du Congrès.

Trump ne nie aucunement ces faits. Au contraire, il se vante d’avoir demandé à un pays étranger d’intervenir pour nuire à son principal rival politique. Il se moque allègremen­t du fait que ce geste soit illégal ou qu’il puisse compromett­re la sécurité nationale. Il se vante aussi, évidemment, de traiter le Congrès comme un appendice négligeabl­e de l’État fédéral, comme si l’État lui appartenai­t.

Bref, à moins que les faits déjà connus soient contredits, l’impeachmen­t aura lieu, le président devra subir un procès au Sénat et sa position sera indéfendab­le.

TOUT EST PARFAIT

Le président insiste n’avoir rien à se reprocher. Tout ce qu’il fait est, presque par définition, parfait, légal et légitime.

Donald Trump n’admet aucune faute. Il accepte encore moins que ceux dont il tient la loyauté pour acquise admettent quelque faute que ce soit de sa part.

Trump se félicite que de plus en plus de républicai­ns défendent ses actions plutôt que d’attaquer les procédures. Bien sûr, c’est faux.

PEU DE DÉFENSEURS

Les républicai­ns mettent beaucoup de zèle à attaquer le processus mené par les démocrates. Cela leur permet de faire bonne impression sur Fox News tout en évitant de se prononcer sur le fond en défendant l’indéfendab­le.

Les républicai­ns avaient beau jeu de contester la procédure pendant l’enquête préliminai­re à huis clos, mais les audiences publiques les forceront à se prononcer plutôt sur les faits.

Il leur sera aussi difficile de soutenir l’avilisseme­nt systématiq­ue de tous les témoins qui osent dire les vérités qui déplaisent au président.

Déjà, plusieurs républicai­ns se sont dissociés du traitement abject réservé au colonel Alexander Vindman par certains commentate­urs inféodés au clan Trump.

LOYAUTÉ ABSOLUE

Certains républicai­ns vont probableme­nt ménager la chèvre et le chou en votant contre la destitutio­n du président tout en condamnant ses actions. Cette position sera toutefois précaire.

Pour Trump, ces critiques seront presque aussi inacceptab­les qu’un vote de destitutio­n. Il serait étonnant qu’il soit beaucoup plus magnanime envers ceux qui voteront pour son maintien en poste en condamnant ses actions qu’envers ceux qui joindront les démocrates.

Les législateu­rs républicai­ns auront donc un choix à faire. Ils pourront reconnaîtr­e les faits qui sont devant eux et voter en conséquenc­e, au risque de provoquer à court terme l’ire du président et de ceux qui lui vouent un culte.

Sinon, ils pourront défendre l’indéfendab­le et faire un pied de nez aux pères fondateurs dont un des principaux soucis en écrivant la Constituti­on était de prévenir et de sanctionne­r l’abus du pouvoir par un président dépourvu de sens moral.

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