Le Journal de Montreal

Renaud Lachance doit douter

- ANTOINE ROBITAILLE Blogueur au Journal antoine.robitaille@quebecorme­dia.com

On se souvient de la dissidence ostentatoi­re du coprésiden­t Renaud Lachance dans le rapport de la commission Charbonnea­u.

« Je ne peux pas souscrire à la thèse développée dans la section 4.6 concluant à un lien indirect entre le versement de contributi­ons politiques et l’octroi des contrats » au Québec, écrivait-il en se basant sur les faits et témoignage­s « présentés en audience ».

TROIS CAS

Des collègues et moi, on se demandait hier si l’ancien vérificate­ur général du Québec n’aura pas envie de douter de sa dissidence à la lumière de certaines des allégation­s dont nous avons fait état ces derniers jours.

Selon des témoignage­s recueillis par les policiers que nous citons, le grand argentier libéral Marc Bibeau aurait carrément annoncé l’octroi d’un contrat public au patron d’une firme de génie qui contribuai­t à la caisse électorale du PLQ.

Il s’agit de Luc Benoît, qui présidait à l’époque la firme Tecsult. Aux dires de ce dernier, Bibeau semblait disposer d’informatio­ns privilégié­es quant aux contrats publics, notamment du ministère des Transports du Québec.

Selon M. Benoît, Marc Bibeau l’avait appelé pour lui annoncer que son entreprise avait obtenu un contrat « avant que ce [ne] soit officiel » ! « Il a fait ça au début, ensuite il a arrêté. C’était, je pense, une façon de nous démontrer qu’il avait contribué à son obtention », note M. Benoît.

DEUX AUTRES CAS

Ce cas s’ajoute à un autre déjà présenté à la commission Charbonnea­u et que Renaud Lachance évoquait d’ailleurs dans sa dissidence.

Georges Dick, un dirigeant de la firme de génie RSW, avait carrément confié à la commission que M. Bibeau s’était livré à du « trafic d’influence » concernant Hydro-Québec. (En passant, c’est M. Dick qui avait décrit le grand jeu de Bibeau : limousine, carte profession­nelle du bureau du premier ministre, etc.)

Un témoignage que les avocats du solliciteu­r avaient jugé non crédible puisqu’il n’était pas corroboré par d’autres.

Or, les policiers de l’UPAC, selon ce que nous apprenait hier le collègue Alexandre Robillard, ont recueilli le témoignage d’un collègue de M. Dick, Claudio Vissa, qui va exactement dans le même sens.

Son témoignage est des plus limpides et est résumé dans une déclaratio­n écrite aux policiers datant de 2014 : « Marc Bibeau nous a dit qu’on fournissai­t moins d’argent que les autres firmes d’ingénierie et il nous a dit qu’il pouvait (que RSW ait moins de contrats) influencer les contrats chez Hydro-Québec [sic]. »

Difficile de ne pas voir dans ces cas un lien, au moins indirect, entre le financemen­t politique et l’octroi de contrats.

On dit souvent que les solliciteu­rs se donnent de l’importance et n’ont pas le pouvoir d’influence qu’ils tentent de laisser croire.

Il reste que solliciter des dons en « prétendant » avoir de l’influence, c’est déjà proscrit par le Code criminel à son article 121.

Étrange quand même que M. Bibeau n’ait pas été amené à témoigner à la commission Charbonnea­u. C’est là une des zones d’ombre de toute cette histoire, comme la dissidence de Renaud Lachance.

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Est-ce que l’ancien vérificate­ur général du Québec, Renaud Lachance, n’aura pas envie de douter de sa dissidence à la lumière de certaines des allégation­s dont nous avons fait état ces derniers jours ?
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