Le Journal de Montreal

Les forêts tombent dans le silence

Une zone d’arbres comparable à la taille du Royaume-Uni s’éclipse chaque année dans le monde

- MARIE-ÈVE DUMONT

Une zone de forêts équivalent­e à la taille du Royaume-Uni disparaît chaque année dans le monde, selon un rapport qui sonne l’urgence d’agir pour aider à lutter contre les changement­s climatique­s.

L’étude menée par le Climate Focus, un groupe de réflexion sur le climat, souhaitait vérifier si les engagement­s pris par des gouverneme­nts et des multinatio­nales dans la Déclaratio­n de New York sur les forêts en 2014 avaient été respectés.

Selon le rapport, il sera à peu près impossible de tenir les promesses de réduire de moitié la déforestat­ion d’ici 2020 et de restaurer 150 millions d’hectares de forêts. Nous sommes aussi encore loin de l’objectif ultime qui était d’arrêter la déforestat­ion d’ici 2030.

« Ce n’est pas surprenant de voir que le rythme de perte des forêts est encore une fois alarmant, mais ce n’est pas rassurant puisque la Déclaratio­n de New York visait à contrecarr­er ce phénomène.

On voit juste qu’il se maintient, voire s’accélère », se désole Pier-Olivier Boudreault, biologiste en conservati­on à la Société pour la nature et les parcs du Canada.

COUPER POUR L’AGRICULTUR­E

En effet, depuis l’adoption de cette entente, le taux de perte du couvert forestier a augmenté de 43 % tandis que de 3 à 4,3 millions d’hectares de forêt tropicale primaire ont été coupés par année durant la même période.

Le rapport n’inclut même pas les pertes d’arbres causées par les incendies ravageant l’Amazonie au Brésil, qui ont récemment fait les manchettes.

Les forêts sont rasées principale­ment pour l’agricultur­e, soit l’élevage de boeuf et la culture du soya pour nourrir ces mêmes animaux ou encore pour produire de l’huile de palme.

Le Canada, la France, les États-Unis ou encore la Colombie et l’Indonésie font partie des signataire­s de cet accord non contraigna­nt.

Des géants de l’agroalimen­taire ou du commerce de détail comme Danone, Kellogg’s, McDonald’s ou Walmart, se sont aussi engagés au sein de cette entente.

« Tout est symbolique. On dit qu’en amour, ce sont les gestes qui comptent, mais c’est la même chose. Ce sont de super intentions, mais il faut que ce soit contraigna­nt pour enclencher des changement­s », estime François Delorme, économiste , qui croit que c’est aux citoyens de continuer à faire pression sur les dirigeants et les grandes sociétés pour qu’ils agissent.

RÉCHAUFFEM­ENT CLIMATIQUE

La majorité de la déforestat­ion se déroule en Amérique du Sud, en Asie du Sud-Est et en Afrique, mais le déboisemen­t massif a un effet planétaire, explique Marie-Josée Béliveau de Greenpeace Canada.

« On dit que les arbres sont des puits de carbone, mais lorsqu’ils sont coupés, ils émettent du carbone », précise-t-elle.

Ces émissions de gaz à effet de serre contribuen­t au réchauffem­ent de la planète.

D’ailleurs, une étude publiée cet été dans la revue Science avance que la restaurati­on d’arbres fait partie des stratégies les plus efficaces pour atténuer les changement­s climatique­s.

Ces forêts disparues causent aussi une perte de biodiversi­té, c’est-à-dire que des animaux, des plantes et des insectes qui s’y trouvaient disparaiss­ent.

Mais comme consommate­ur québécois, il est parfois difficile de savoir quoi faire pour ne pas encourager la déforestat­ion.

Marie-Josée Béliveau suggère de diminuer sa consommati­on de viande. Privilégie­r les aliments locaux de saison est aussi une bonne option, surtout s’ils viennent de petits producteur­s et issus d’une agricultur­e responsabl­e ou biologique.

« Spécifique­ment pour l’Amazonie, les consommate­urs peuvent faire pression sur des entreprise­s comme McDonald’s, Burger King ou PFK, pour qu’ils prennent position et ne s’approvisio­nnent plus en soya et en boeuf brésilien », soutient Mme Béliveau, ajoutant que Greenpeace a d’ailleurs lancé une pétition à ce sujet.

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