Le Journal de Montreal

Peut-on revenir sur sa décision de prendre une retraite anticipée ?

- Sébastien Parent Avocat, droit du travail

D’avis que vous vous êtes assez investi dans votre travail et qu’il est temps de profiter pleinement de la vie pendant que vous êtes encore en santé, vous annoncez à votre patron la date de votre retraite.

Une fois que cette décision a été prise, pouvez-vous revenir en arrière ? Qu’arrive-t-il si, pour une raison ou une autre, vous changez d’idée et désirez reporter votre retraite à plus tard ?

MAUVAIS CALCUL

Dans un contexte de réorganisa­tion, une conseillèr­e en formation chez Hydro-Québec décide de se prévaloir d’une retraite anticipée. Elle remplit alors un formulaire de demande de calcul pour le régime de retraite applicable chez son employeur, dans lequel elle indique la date à compter de laquelle sa retraite sera effective.

Ce formulaire précise d’ailleurs que la demande de calcul constitue un engagement formel de l’employé à prendre sa retraite à la date inscrite.

Or, la travailleu­se découvre que si elle avait attendu deux ans avant de prendre sa retraite, elle aurait obtenu 5000 $ de plus par année en rente. Croyant que sa décision est révocable, elle demande à son employeur d’annuler sa retraite anticipée. Erreur !

DÉMISSION

Son employeur refuse de changer la date de retraite, avec raison.

En effet, il est bien reconnu que la décision de prendre sa retraite équivaut à une démission pure et simple.

Par conséquent, la salariée devait respecter la date de départ à la retraite qu’elle avait initialeme­nt choisie. Son lien d’emploi prenait donc fin à ce moment, comme le confirme justement le Tribunal administra­tif du travail.

CHOIX LIBRE ET ÉCLAIRÉ

En principe, le seul moyen pour un employé qui souhaite faire annuler son départ à la retraite serait de démontrer que sa décision n’était pas libre et volontaire. Autrement dit, que son consenteme­nt était vicié.

Ce serait le cas, par exemple, si le salarié était incapable de consentir en raison d’un problème de santé mentale ou lorsque son choix de partir à la retraite a été provoqué par des pressions de son employeur.

Cela étant dit, la conduite postérieur­e du travailleu­r sera également pertinente. Il pourra difficilem­ent convaincre un juge que son consenteme­nt n’était pas libre et éclairé, s’il a entrepris des démarches auprès de la Régie des rentes du Québec ou de l’administra­teur de son régime de retraite, s’il a annoncé son départ à la retraite à ses collègues et qu’il a formé son successeur !

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