Le nouvel équilibre de la terreur
Moscou – Washington en 15 minutes. C’est le temps que mettraient les nouveaux missiles russes Avangard tirés de Moscou pour frapper Washington. Ces missiles sont censés voyager à Mach 27. Aucune arme connue ne pourrait les arrêter.
Leur déploiement a été annoncé hier par le ministre de la Défense russe. D’autres armes tout aussi terrifiantes seraient sur le point d’aboutir : des lasers surpuissants, des missiles à portée illimitée, et bien entendu, des armées de drones intelligents. Ces avancées militaires changent la donne.
1 Les Russes sont-ils les seuls à posséder des missiles hypersoniques aussi performants ?
Les autorités russes affirment avoir des années d’avance sur leurs plus proches compétiteurs comme la Chine, les ÉtatsUnis, l’Inde ou la France et l’Allemagne. Le retard des autres puissances dans ce domaine soulève d’ailleurs des questions sur la gestion du développement des armes de ces pays.
2 En quoi ces nouvelles armes renforcent-elles la Russie ?
La Russie ne constitue pas une menace directe contre les grandes puissances. Il serait étonnant, mais non impossible que Vladimir Poutine utilise son nouvel armement pour réaliser des gains territoriaux. Grâce à ce nouvel arsenal, la Russie redevient un partenaire militaire sérieux pour plusieurs pays. En effet, le territoire russe est mieux protégé qu’il ne l’était depuis les 30 dernières années. Moscou pourrait donc venir au secours de ses alliés de manière plus crédible, c’est-à-dire sans trop redouter une attaque contre son territoire. Car des armes aussi rapides signifient que les forces principales de pays ennemis peuvent être détruites avant qu’ils aient le temps de réagir. Enfin, le prestige de l’armement russe augmente, ce qui n’est pas à négliger dans le marché mondial des ventes d’armes.
3 Quelles sont les conséquences des nouvelles armes sur la géostratégie ?
Les conséquences sont nombreuses. Par exemple, les nouvelles armes ont des décennies d’avance sur les vieilles armes nucléaires. Les autres grandes puissances militaires devraient annoncer d’ici quelques années des percées importantes dans ces domaines. Mais il est douteux que les petites puissances puissent rattraper ce retard avant très longtemps. Par ailleurs, ceux qui hésitent à mettre en danger la vie de leurs soldats, comme les dirigeants américains, devraient se sentir beaucoup plus libres d’envoyer des troupes formées de drones. Nous n’y sommes pas tout à fait encore, mais cette possibilité se rapproche.
4 Est-ce un nouvel équilibre de la terreur ?
Nous assistons à la naissance d’un nouvel équilibre de la terreur. Les pays qui pourront maîtriser les nouvelles technologies militaires seront peu nombreux et n’oseront pas s’attaquer directement entre eux. La fenêtre est donc en train de se refermer rapidement pour les petites et moyennes puissances qui voudraient profiter de l’ordre actuel pour gagner du territoire ou de l’influence. Ainsi, il serait surprenant que l’Iran ou la Corée du Nord se dotent d’armes aussi avancées avant quelques décennies.
5 Que doit faire le Canada ?
Le Canada est condamné à suivre les États-Unis dans ce domaine. Plusieurs chercheurs canadiens et québécois refusent que leurs travaux servent à la fabrication de ce nouvel armement. Leurs objections morales sont louables. Mais la vérité est qu’il est infiniment préférable que des pays démocratiques possèdent ce type d’armement, plutôt que des pays autoritaires, voire totalitaires. La course aux nouvelles technologies militaires est lancée depuis longtemps. Nous n’avons d’autre choix que d’y consacrer davantage de ressources. Mieux vaut être du côté des gagnants que de celui des perdants.