S’occuper des vrais problèmes
Bien qu’il continue à enregistrer de fortes oppositions, le ministre de l’Éducation poursuit dans ses intentions de chambouler le monde scolaire. Jean-François Roberge propose des transformations majeures qui n’amélioreront en rien l’environnement scolaire et la réussite éducative.
Prenant au mot certains lecteurs qui réduisent mon opposition au projet de loi 40 à mes origines syndicales, je suis allé m’enquérir de l’opinion de mes patrons d’hier.
Tous considèrent qu’il y a des problèmes beaucoup plus urgents que les structures dont le ministre devrait s’occuper.
√ Réjean Morel a été directeur général de la FCSQ et précédemment cadre à la direction des finances du ministère de l’Éducation. Pour lui, le projet de loi reflète une guerre de pouvoir entre les fonctionnaires du ministère et ceux des commissions scolaires et générera une structure de gouvernance inefficace.
Les commissions scolaires sont les seuls organismes publics contraints de fournir le service complet et immédiat. Les élèves ne peuvent pas être stationnés dans les corridors ou inscrits sur une liste d’attente. La classe doit être accessible dès qu’ils ont l’âge de fréquenter l’école. Cette situation nécessite des administrateurs délurés qui ne s’égarent pas dans des intérêts particuliers. Au lieu de rayer de la carte les commissaires élus, Morel propose plutôt de moderniser leur fonction.
√ Serge Dubé a gravi tous les échelons du monde scolaire pour devenir directeur général d’une commission scolaire. Il est maintenant maire d’une municipalité. Il aurait pu vouloir et souhaiter la disparition des commissaires, ceux-ci l’ayant empêché, dans le passé, d’accéder à certains postes. Au contraire, il les considère comme un filtre démocratique qui favorise l’équité entre les établissements.
Les enfants rois s’avèrent un défi de taille pour l’école, et Dubé souhaiterait que le ministre mette au travail, ensemble, les parents, les enseignants et les enfants dans la construction d’un rapport prof-élève plus respectueux et productif. Il presse plus de créer les conditions favorisant le recrutement d’enseignants que d’instaurer des structures qui se révéleront des repoussoirs.
√ Gilles Bouchard a complété son parcours dans le monde scolaire comme directeur des services éducatifs et oeuvre maintenant à la formation des maîtres dans le monde universitaire. L’homme aux millions d’idées est plutôt satisfait de l’évolution du monde scolaire et est loin de trouver utile la réforme du ministre.
Sa crainte est de voir des directeurs d’école encore moins disponibles pour leur personnel avec les responsabilités nouvelles qui leur incomberont. Il a
Les élèves ne peuvent pas être stationnés dans les corridors ou inscrits sur une liste d’attente
d’ailleurs observé que plus on décentralise moins les directeurs sont présents dans leur école.
AVANCER SAVAMMENT
Le ministre devrait suspendre son projet de loi et s’inspirer d’une suggestion de Camil Bouchard, ex-député péquiste, qui proposait d’expérimenter plus d’autonomie pour quelques écoles dans le cadre de projets pilotes.
À la lumière des résultats, les suites adéquates pourraient être envisagées.
Le bon sens scientifique commande qu’on ait testé un nouveau procédé avant de le généraliser. L’école ne devrait pas échapper à cette vérité de La Palice !