Le Journal de Montreal

Des cyclistes passent à l’attaque pour rouler à droite

Un recours judiciaire afin de pouvoir circuler à vélo sur les voies réservées aux bus

- DAPHNÉE HACKER-B. prednaopmh­n.neoem.ha@cqkuere@beqcuoerbm­eecdoiram.ceodmia.com

AGENCE QMI | À Montréal, il est interdit de circuler à vélo sur les rues où il y a des voies réservées aux autobus, sauf si la signalisat­ion l’autorise. Des cyclistes exaspérés entament un recours judiciaire pour faire changer cette réglementa­tion qui entre en conflit avec le Code de la sécurité routière.

Chaque matin, quand Sébastien Carrillo enfourche son vélo pour aller au travail, il commet des infraction­s au règlement municipal.

« J’emprunte souvent des artères où il y a des voies réservées au transport collectif, c’est le chemin le plus rapide », explique celui qui fait partie du groupe qui déposera un recours judiciaire à la Cour supérieure dans les prochaines semaines.

Je me suis rendue sur de grands axes routiers munis de voies réservées tels que René-Lévesque, Papineau et Sherbrooke. En quelques minutes à peine, même en plein hiver, j’ai pu voir plusieurs cyclistes circuler dans la voie d’extrême droite. C’est d’ailleurs ce qu’exige de faire le Code de la sécurité routière.

Autrement dit, Québec interdit de pédaler au milieu d’une chaussée et Montréal interdit de rouler à l’extrême droite.

Résultat : les cyclistes qui empruntent une rue munie d’une voie réservée commettent un acte illégal, peu importe où ils se mettent. Et la vaste majorité d’entre eux l’ignorent, m’ont confirmé des policiers, car l’interdicti­on n’est affichée nulle part.

Les agents de la police de Montréal font preuve de « tolérance » et misent sur la sensibilis­ation. Ça ne les empêche pas de remettre des constats d’infraction à l’occasion, ce qui enrage les cyclistes.

PLUS DE ZONE GRISE

« Notre but est d’en finir avec cette zone grise », lance Me Ulisce Desmarais Grégoire, qui représente­ra les demandeurs dans ce recours en jugement déclaratoi­re.

Le but de cette démarche, explique l’avocat du cabinet DDC Légal, est de faire déclarer la réglementa­tion municipale « inopérante » et de montrer que c’est la loi provincial­e qui prévaut.

Traduction de ce bla-bla juridique : les cyclistes pourraient alors emprunter toutes les voies réservées sur le territoire montréalai­s à tout moment de la journée, et non pas juste les quelques voies réservées où la cohabitati­on vélo-bus est permise, comme sur la rue Viau et le boulevard Thimens.

« L’administra­tion Plante prétend être en faveur du transport actif, mais cette interdicti­on est une aberration », s’indigne le cycliste Alain Deschamps, un des codemandeu­rs du recours.

Il rappelle que les villes de Laval et de Québec permettent la cohabitati­on vélobus sur toutes les voies réservées, en plus de Paris et de San Francisco.

Au cabinet de la mairesse Valérie Plante, on me confirme que des élus font des pressions pour changer la réglementa­tion, mais que « cela peut prendre plus de temps qu’initialeme­nt prévu ».

La Ville doit d’abord s’entendre avec la Société de transport de Montréal et prévoit de formuler des recommanda­tions « au printemps ».

LES CHAUFFEURS CONTRE

Là où ça bloque : au Syndicat de la fonction publique, qui représente les chauffeurs de la Société de transport de Montréal (STM). Le président de la section transport terrestre, Guy Germain, fait valoir qu’il n’est pas sécuritair­e de mettre sur une même voie un poids lourd avec des usagers vulnérable­s.

L’idéal, selon le syndicat, serait de créer des pistes cyclables séparées physiqueme­nt des voies réservées.

Ces déclaratio­ns font fulminer Suzanne Lareau, de Vélo Québec.

« Ça fait 10 ans, voire 15 ans, qu’on nous sert les mêmes excuses et qu’on parle des mêmes solutions ! Rien ne bouge. [...] Je comprends totalement l’exaspérati­on des militants qui entament ce recours. »

Un comité regroupant la STM, la Ville et Vélo Québec doit tenir une rencontre cette semaine. On peut parier que le spectre du recours judiciaire va alimenter les discussion­s sur ce dossier qui, de toute évidence, traîne en longueur.

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PHOTO AGENCE QMI, TOMA ICZKOVITS Les cyclistes qui roulent sur l’avenue Papineau à l’heure de pointe matinale n’ont légalement pas le droit d’y être, la voie étant réservée aux autobus et aux taxis.
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