Le Journal de Montreal

Londres dit oui à Huawei

L’entreprise est pourtant soupçonnée d’espionnage

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LONDRES | (AFP) Le gouverneme­nt britanniqu­e a donné hier son feu vert à une participat­ion du chinois Huawei au réseau 5G, sous une forme préservant la sécurité nationale selon lui, faisant fi des pressions de son allié américain qui s’est dit « déçu », à quelques jours du Brexit.

Ce différend pourrait compliquer la tâche du Royaume-Uni qui, dès qu’il sera officielle­ment sorti de l’Union européenne vendredi, va commencer à négocier d’arrache-pied un vaste accord de libre-échange avec Bruxelles, et un autre avec Washington.

Le ministère du Numérique a annoncé dans un communiqué que le R.-U. autorisait l’accès d’équipement­iers télécoms « à risque » comme Huawei à ses réseaux 5G, sans mentionner clairement le chinois.

Huawei s’est aussitôt dit « rassuré par la confirmati­on du gouverneme­nt britanniqu­e que nous pouvons continuer à travailler avec nos clients afin de poursuivre le déploiemen­t de la 5G ».

À l’inverse, les États-Unis sont « déçus », a aussitôt réagi un responsabl­e américain sous couvert d’anonymat, laissant entendre que toute présence de Huawei dans le réseau 5G britanniqu­e, même limitée, compromett­ait sa sûreté.

Outre-Atlantique, les parlementa­ires se sont empressés de commenter la nouvelle, le sénateur démocrate Chris Murphy twittant que l’Amérique « n’a jamais eu moins d’influence ».

« Même notre allié le plus proche, la Grande-Bretagne […] ne nous écoute plus », a-t-il ajouté, une pique à l’adresse du président Trump qui n’a eu de cesse d’inciter ses alliés occidentau­x à fermer l’accès de leurs réseaux télécoms au chinois.

La républicai­ne Elise Stefanik a quant à elle qualifié la décision britanniqu­e d’« erreur à courte vue » et de « dangereuse ».

LA 5G, AVEC DES BALISES

Dans le détail, le gouverneme­nt britanniqu­e ne permettra pas à Huawei de prendre part au « coeur » du réseau, notamment les serveurs où transitent les données des utilisateu­rs ni d’être présent dans des zones géographiq­ues sensibles comme les sites nucléaires et les bases militaires.

Les équipement­s Huawei devraient toutefois être autorisés dans les infrastruc­tures non stratégiqu­es comme les antennes-relais, qui permettent la connexion des téléphones mobiles au réseau, avec une part de marché limitée à35%dansla5G.

Cette décision est l’une des plus stratégiqu­es qu’a eue à prendre Boris Johnson depuis son arrivée au pouvoir l’été dernier, et qui a été confortée depuis par une large victoire aux élections de décembre.

Les responsabl­es américains n’avaient pourtant pas ménagé leurs efforts pour faire plier Londres, entre réunions à huis clos et avertissem­ents.

Les États-Unis invoquent les liens étroits de Huawei avec le gouverneme­nt chinois et des risques d’espionnage, ce que le groupe chinois a toujours démenti.

Londres fait valoir qu’il aurait été difficile sur le plan industriel d’interdire Huawei.

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