Le Journal de Montreal

Quand une mère refuse de couper le cordon avec son enfant !

- LOUISE DESCHÂTELE­TS louise.deschatele­ts@quebecorme­dia.com

Un peu après que la poussière soit retombée sur la déroute de ma vie sentimenta­le, il m’a pris l’envie de vous la raconter pour que vous me donniez votre avis. Personnell­ement, j’en ai tiré mes conclusion­s puisque c’est moi qui ai décidé de mettre un terme à une relation où je me savais perdant bien avant la rupture.

Il y a une dizaine d’années, j’ai rencontré la mère d’une fille de treize ans qui venait de se séparer. Nous étions attirés l’un par l’autre, mais comme elle n’était pas prête à partager son quotidien avec un autre homme, j’ai accepté qu’on se voie sans cohabiter. Elle disait que ça allait nous permettre de mieux nous connaître, et ainsi éviter l’échec.

Dès le début de notre relation, je n’ai pas senti que la jeune ado me souhaitait dans sa vie. Au mieux, elle m’endurait. Elle n’a rien manifesté quand sa mère me l’a présentée et elle s’est murée dans un silence qui ne s’est pas démenti avec les années. Jamais elle ne me saluait quand j’allais chez sa mère et elle me parlait avec aussi peu d’enthousias­me. Un meuble lui aurait fait le même effet.

J’avais beau la saluer, lui demander comment ça allait dans ses études, tenter de lui faire parler de ses intérêts ou de ses amies, rien ne la déridait. Elle restait muette comme une taupe en me regardant à peine. Quand j’en parlais avec sa mère elle me répondait « Attends, ça va finir par s’arranger. Je pense qu’elle t’apprécie, mais qu’elle hésite à te le dire. »

Les années ont passé sans que son attitude ne change. Je pourrais presque compter sur les doigts de mes deux mains le peu d’échanges qu’il y a eu entre nous. Au fil des ans, la mère se montrait de plus en plus intéressée par ma personne et a commencé à souhaiter qu’on cohabite. Mais quand je lui objectais l’attitude de sa fille pour refuser qu’on s’installe ensemble quand elle insistait, elle me répliquait toujours que je manquais de patience.

Je n’étais peut-être pas patient, mais je ressentais tellement fort le rejet de cette fille à mon endroit, que je n’ai jamais succombé aux désirs de sa mère de m’installer avec elles. Et il y a quelques mois, la fille ayant désormais dépassé la vingtaine, j’ai signifié à la mère que c’était fini entre nous.

J’en étais arrivé à la conclusion qu’elle ne couperait jamais le cordon ombilical d’avec ses parents. J’en étais d’autant plus convaincu que le père n’ayant jamais eu d’autre femme dans sa vie depuis sa séparation, sa fille était la seule femme qui comptait pour lui. En conclusion, j’aimerais savoir ce que vous en pensez, et surtout me dire si j’ai bien fait de rompre?

Anonyme

Vous avez vu juste en pensant que cette fille ne voulait pas couper le cordon, mais ce que vous ne dites pas, c’est que ses parents non plus ne souhaitaie­nt pas le couper. La preuve en est qu’ils se sont l’un et l’autre gardés de déplaire à leur fille. Le père en s’abstenant de faire entrer une compagne dans sa vie pour lui laisser toute la place. Et la mère en ne vous imposant pas dans la vie qu’elle menait avec sa fille. Ça se joue à deux, ces jeux-là. Et pour peu que les parents fassent passer leur enfant avant eux-mêmes, les dés sont jetés. Et lorsqu’on n’a pas sa place quelque part, mieux vaut laisser tomber toute velléité de s’incruster. Si la mère avait été un tant soit peu consciente de son rôle d’éducatrice, elle n’aurait pas attendu que sa fille dépasse la vingtaine pour lui inculquer le bien fondé de couper un cordon ombilical rendu néfaste pour tout le monde, et surtout pour l’émancipati­on de cette enfant devenue adulte.

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