Le Journal de Montreal

D’AUTRES INQUIÉTUDE­S PLANENT AU-DESSUS DE BOMBARDIER

Des régimes de retraite déficitair­es de 4 milliards $

- SYLVAIN LAROCQUE

Bombardier ne traîne pas seulement une lourde dette de 12,4 milliards $. La multinatio­nale a également accumulé, dans ses régimes de retraite, des déficits qui dépassent les 4 milliards $.

Il s’agit, et de loin, du plus important passif de ce type pour une entreprise québécoise.

« C’est évident que ça n’aide pas » le redresseme­nt financier de Bombardier, affirme le professeur de comptabili­té Michel Magnan, titulaire de la Chaire de gouvernanc­e Jarislowsk­y de l’Université Concordia.

« C’est une obligation financière qui est non négligeabl­e », ajoute-t-il.

SITUATION PIRE QU’AILLEURS

Une bonne partie du passif lié aux régimes de retraite découle de l’acquisitio­n du constructe­ur européen de matériel roulant Adtranz, une transactio­n qui remonte à 2001.

À la fin de 2018, le taux de capitalisa­tion des régimes canadiens de Bombardier était de 83 %. C’est bien moins que le taux médian des 409 régimes à prestation­s déterminée­s du secteur privé au Québec, qui s’établissai­t à 109 % à la même date, selon Retraite Québec.

L’ampleur du trou à combler fluctue en fonction des taux d’intérêt. Pendant les neuf premiers mois de 2019, le passif des régimes de retraite de Bombardier a bondi de 42 %. En septembre 2016, il avait frisé les 4,4 milliards $.

David Chartrand, coordonnat­eur québécois de l’Associatio­n internatio­nale des travailleu­rs de l’aérospatia­le, dit ne pas avoir reçu de questions de la part des syndiqués de Bombardier à propos des déficits des caisses de retraite.

QU’ARRIVE-T-IL EN CAS DE VENTE ?

Par contre, a-t-il reconnu, il y a des travailleu­rs « qui se posent cette question : qu’est-ce qui arrivera avec notre régime de retraite si Bombardier est vendu ou ferme, ou quoi que ce soit ? »

« En général, les régimes de retraite font partie de la business parce que, quand on vend une division, les employés viennent avec et, forcément, le régime de retraite aussi », répond M. Magnan.

Si Bombardier devait échouer sa restructur­ation et disparaîtr­e, l’avenir des régimes de retraite serait plus sombre, comme on l’a vu récemment dans le dossier de Capitales Médias.

Michel Magnan note que le passif des régimes de retraite pèsera dans la balance si Bombardier décide de vendre l’une de ses deux divisions restantes, les avions d’affaires et les trains, voire les deux.

« Si vous êtes l’acquéreur, c’est un élément que vous allez considérer, explique le spécialist­e. Ça va faire partie des négociatio­ns et influencer le prix de vente. »

Lorsque Bombardier a annoncé la vente de ses usines de Belfast, en Irlande du Nord, et de Casablanca, au Maroc, en octobre, l’acheteur, Spirit AeroSystem­s, a indiqué qu’il allait assumer des obligation­s de près de 400 M$ liées aux régimes de retraite.

Bombardier compte plus de 68 000 employés à travers le monde

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PHOTO D’ARCHIVES, PIERRE-PAUL POULIN Des employés de la division aéronautiq­ue de Bombardier, à Mirabel, en 2018. L’entreprise compte 14 500 salariés au Québec.

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