Ben ordinaires
Dans sa chanson, Robert Charlebois parle de lui-même en se décrivant comme « juste un gars ben ordinaire ». Sympathique, attachant. Alors, méritons-nous ce statut de citoyens extraordinaires au Québec, lorsqu’il est question de changements climatiques ?
Nombre de ceux qui affirment parler au nom du Québec, dans les chicanes du Canada, adorent se gargariser du fait que les Québécois seraient les plus verts. Verts et vertueux, nous aurions donc des leçons à donner puisque l’écologie ferait même partie de notre identité propre.
NOS ACHATS
Il est de bon aloi ici de parler des Québécois comme d’un peuple vert et vertueux. Nos achats de gros véhicules obligent à des nuances.
La revue vient de publier le palmarès des véhicules les plus vendus au Québec. Parmi les 10 premiers modèles, trois camionnettes et trois VUS. Les Ford série F, le Ram et le GMC Sierra arrivent tous dans ce peloton de tête. Des véhicules qui réclament leur portion d’essence pour se mouvoir.
De l’autre côté, les ventes de véhicules électriques connaissent une croissance exceptionnelle de 71 % ! Cela demeure un petit nombre sur le total puisque seulement deux modèles apparaissent dans le top 50.
Est-ce que j’essaye de dire que les Québécois ne sont pas des verts, mais de vilains pollueurs ? Pas du tout. Ma croyance, c’est que les Québécois agissent à peu près comme tous les humains de la planète. Ils effectuent les choix les plus logiques en fonction de leurs besoins et en fonction de leurs moyens. Ils ne magasinent ni avec les logos des pétrolières tatoués sur le coeur ni avec le catéchisme de Greenpeace dans la main.
Les généreuses subventions poussent l’auto électrique. Beaucoup de gens auront besoin d’une camionnette pour aller en forêt, pour travailler ou pour tirer une remorque. Des familles avec trois enfants et quelques poches de hockey opteront pour l’espace nécessaire. Chacun agit selon sa logique, dans un pays libre où l’on a aussi droit à ses préférences.
D’aucune façon le palmarès des véhicules vendus ne décrit les Québécois comme étant d’une classe à part. Je le répète souvent, notre bilan en matière de gaz à effet de serre est reluisant dû au choix d’un dénommé Robert Bourassa qui a investi massivement dans l’hydroélectricité. À son époque, personne n’avait entendu parler de changements climatiques et les militants de l’environnement le dénonçaient comme un destructeur des écosystèmes du Nord.
PIEDS SUR TERRE
Cela dit, je demeure personnellement convaincu du fait qu’il faut opérer cette transition énergétique. La solution sera un mélange de changements de comportement, de nouvelles technologies disponibles et de progrès scientifiques.
Loin de moi l’idée de vouloir dévaloriser les efforts des Québécois en matière d’environnement, je tiens seulement à nous ramener les pieds sur terre. Nous consommons 365 000 barils de pétrole par jour. Avec les récentes ventes de véhicules, convenons que ce chiffre ne tombera pas à zéro en quelques années.
Le Canada nous interpelle pour acheter du pétrole canadien plutôt que d’en acheter de l’étranger. Nous devrions cesser de regarder en l’air en sifflant comme si la question ne nous concernait pas, comme si nous allions cesser d’en utiliser la semaine prochaine.