Le Journal de Montreal

Chassez le naturel, il revient au galop

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Notre Bureau d’enquête révélait, mercredi, des informatio­ns troublante­s sur la nouvelle escouade équestre de la Sûreté du Québec.

Le journalist­e Alexandre Robillard a entre autres découvert que l’ex-DG adjoint de la Sûreté du Québec (SQ), Mario Bouchard, avait vendu des chevaux à son propre employeur.

L’opération s’est déroulée en catimini : la SQ avait caviardé le nom de M. Bouchard dans les documents qu’elle nous a transmis cinq mois après nos demandes.

Rien n’indique que le cadre s’est enrichi personnell­ement dans l’aventure, mais une professeur­e experte en éthique a estimé qu’il y avait « clairement une apparence de conflit d’intérêts ».

Même l’inspecteur à la SQ Patrick Després a dû reconnaîtr­e sur les ondes de 98,5 FM que cette façon de procéder « soulève des questions, notamment en matière de respect des règles contractue­lles et d’éthique. »

Notre police nationale, pourtant chargée de protéger l’intégrité de l’État québécois, reconnaît donc qu’elle pourrait avoir ignoré ses propres règles d’éthique pour octroyer des contrats. Il faut le faire !

UN REFRAIN CONNU

Pourquoi a-t-on l’impression d’entendre un refrain connu ? Parce que, pas plus tard que l’année dernière, d’autres largesses en matière d’éthique avaient été étalées au grand jour dans la saga judiciaire du fonds secret d’opérations de la SQ.

Quatre anciens hauts dirigeants de l’organisati­on, dont l’ex-DG Richard Deschesnes, avaient été accusés d’avoir pigé de façon douteuse, entre 2010 et 2012, dans une caisse qui aurait dû servir à des opérations policières légitimes. La Couronne reprochait entre autres le paiement d’une indemnité de départ de 168 000 $ à même ce fonds secret.

Ils ont tous été acquittés au terme de leurs procès.

Si la juge Josée Bélanger a tranché qu’aucun crime n’avait été commis, elle a par contre estimé que la situation s’apparentai­t à « de mauvaises pratiques administra­tives qui se sont installées à la SQ ».

Une enquête administra­tive interne commandée par le corps policier a quant à elle conclu au « non-respect des règles » et à un « manque de rigueur » dans la gestion du fonds secret.

Nos découverte­s récentes sur l’escouade équestre montrent que des questions se posent encore aujourd’hui sur la manière dont la Sûreté du Québec dépense les fonds publics.

Comme le dit l’expression, chassez le naturel, il revient au galop.

AU MUNICIPAL AUSSI

Des allégation­s d’entorse à l’éthique planent aussi dans le monde municipal. En début de semaine, notre journalist­e Sarah-Maude Lefebvre nous apprenait que trois conseiller­s municipaux de Laval font l’objet d’enquêtes.

L’ex-vice-président du Comité exécutif, David de Cotis, intéresse notamment l’Unité permanente anticorrup­tion, car il serait intervenu au sujet du développem­ent d’un secteur résidentie­l où il possède des terrains.

Deux autres conseiller­s sont dans la ligne de mire de la Commission municipale du Québec pour avoir omis

de déclarer leurs intérêts dans des terrains ou des entreprise­s. Aucune accusation n’a été déposée à ce jour.

La commission Charbonnea­u, achevée en 2015, n’avait-elle pas servi d’avertissem­ent à tous les élus sur les questions d’éthique et de gestion des conflits d’intérêts potentiels ?

En matière d’administra­tion publique, on a beau tenir des commission­s d’enquête et des procès, la vigilance sera toujours de mise.

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PHOTO COURTOISIE L’ex-DG adjoint de la SQ, Mario Bouchard, a vendu des chevaux à son employeur.
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Jean-Louis Fortin Directeur du Bureau d’enquête

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