Trudeau : déliquescence précoce
Le gouvernement Trudeau-fils-2 ne durera pas quatre ans. C’est l’impression qu’on avait hier devant deux situations cruciales pour lui.
«JUSTWATCHME»
D’abord, le blocage des voies ferrées par des militants autochtones, qui pose un dilemme redoutable au gouvernement.
J’affectionne le mot dilemme, « obligation de choisir entre deux options comportant l’une et l’autre des inconvénients ».
La première option est de type « Just watch me » : foncer dans le tas, mobiliser l’armée enflammerait assurément tous les peuples autochtones ainsi que les gauches. Une crise incontrôlable risquerait d’éclater. Plusieurs petits Oka d’un océan à l’autre.
Pour l’image du gouvernement Trudeau, autoproclamé le plus proautochtone de l’histoire du Dominion, ce serait aussi dommageable... qu’un parti se proclamant vert qui achète et construit un oléoduc.
« JUST DON’T WATCH »
D’où l’option choisie par Ottawa depuis le début des blocages : « Just don’t watch. » Bref, regarder ailleurs ; à la limite, parler timidement de « règle de droit » et de « dialogue ». Au départ, ce choix pouvait s’expliquer : rejet de la méthode forte pour les raisons ci-haut évoquées. Refus de donner de l’importance aux manifestations.
Cependant, plus la crise dure, plus les inconvénients s’aggravent : le trafic ferroviaire est carrément bloqué !
En plus, le PM est en tournée à l’étranger. Pratique, au départ, pour le « Just don’t watch ». Mais plus le temps passe, plus il paraît déconnecté des priorités intérieures. Un « deux poids deux mesures » crève les yeux et enrage les non-autochtones : si un d’entre eux (actuellement privés de transport) s’avisait de bloquer un train pour quelque raison, il serait arrêté et accusé sur-le-champ tel un membre d’Extinction-Rebellion sur un pont fédéral.
François Legault a bien perçu la situation de faiblesse du PM fédéral, et jeudi, même si on ne lui adressait aucune question à ce sujet, il a tenu à mettre toute la responsabilité sur le dos de son homologue : « C’est à Justin Trudeau de régler le problème ».
Hier, d’ailleurs, ce dernier, de Munich, a tenu à poser un geste : lui donner un coup de fil !
DIVISION
À cette extrême faiblesse du gouvernement Trudeau devant la paralysie des transports s’ajoute un clivage croissant au caucus libéral, suscité par l’autorisation ou non du projet bitumineux Teck Frontier en Alberta.
D’un côté, il y a Chrystia Freeland, vice-première ministre, chargée de replâtrer les relations avec l’Ouest, qui sait que politiquement, son gouvernement n’a pas d’autre choix que d’approuver.
De l’autre, il y a le caucus du Québec, qui ne se cache plus pour faire valoir son opposition. Députée de Brossard–Saint-Lambert, Alexandra Mendès a déclaré au jeudi qu’une approbation serait « absolument impensable » !
À cette extrême faiblesse du gouvernement Trudeau devant la paralysie des transports s’ajoute un clivage croissant au caucus libéral suscité par l’autorisation ou non du projet bitumineux Teck Frontier en Alberta.
ROBITAILLE
L’ancien expert en manifestation verte, Steven Guilbeault, devenu ministre du Patrimoine, a goûté hier à sa médecine : des écologistes ont occupé son bureau. Si le gouvernement approuvait Teck, il se verrait contraint de songer à une sortie à la Nicolas Hulot, ministre français de l’Environnement qui démissionna en 2018 avec fracas sur une question de principe.
Les conservateurs devraient se dépêcher de se donner un chef. J’en mets un peu... mais au cas où.