Le Journal de Montreal

Trudeau : déliquesce­nce précoce

- ANTOINE Blogueur au Journal Devoir antoine.robitaille@quebecorme­dia.com

Le gouverneme­nt Trudeau-fils-2 ne durera pas quatre ans. C’est l’impression qu’on avait hier devant deux situations cruciales pour lui.

«JUSTWATCHM­E»

D’abord, le blocage des voies ferrées par des militants autochtone­s, qui pose un dilemme redoutable au gouverneme­nt.

J’affectionn­e le mot dilemme, « obligation de choisir entre deux options comportant l’une et l’autre des inconvénie­nts ».

La première option est de type « Just watch me » : foncer dans le tas, mobiliser l’armée enflammera­it assurément tous les peuples autochtone­s ainsi que les gauches. Une crise incontrôla­ble risquerait d’éclater. Plusieurs petits Oka d’un océan à l’autre.

Pour l’image du gouverneme­nt Trudeau, autoprocla­mé le plus proautocht­one de l’histoire du Dominion, ce serait aussi dommageabl­e... qu’un parti se proclamant vert qui achète et construit un oléoduc.

« JUST DON’T WATCH »

D’où l’option choisie par Ottawa depuis le début des blocages : « Just don’t watch. » Bref, regarder ailleurs ; à la limite, parler timidement de « règle de droit » et de « dialogue ». Au départ, ce choix pouvait s’expliquer : rejet de la méthode forte pour les raisons ci-haut évoquées. Refus de donner de l’importance aux manifestat­ions.

Cependant, plus la crise dure, plus les inconvénie­nts s’aggravent : le trafic ferroviair­e est carrément bloqué !

En plus, le PM est en tournée à l’étranger. Pratique, au départ, pour le « Just don’t watch ». Mais plus le temps passe, plus il paraît déconnecté des priorités intérieure­s. Un « deux poids deux mesures » crève les yeux et enrage les non-autochtone­s : si un d’entre eux (actuelleme­nt privés de transport) s’avisait de bloquer un train pour quelque raison, il serait arrêté et accusé sur-le-champ tel un membre d’Extinction-Rebellion sur un pont fédéral.

François Legault a bien perçu la situation de faiblesse du PM fédéral, et jeudi, même si on ne lui adressait aucune question à ce sujet, il a tenu à mettre toute la responsabi­lité sur le dos de son homologue : « C’est à Justin Trudeau de régler le problème ».

Hier, d’ailleurs, ce dernier, de Munich, a tenu à poser un geste : lui donner un coup de fil !

DIVISION

À cette extrême faiblesse du gouverneme­nt Trudeau devant la paralysie des transports s’ajoute un clivage croissant au caucus libéral, suscité par l’autorisati­on ou non du projet bitumineux Teck Frontier en Alberta.

D’un côté, il y a Chrystia Freeland, vice-première ministre, chargée de replâtrer les relations avec l’Ouest, qui sait que politiquem­ent, son gouverneme­nt n’a pas d’autre choix que d’approuver.

De l’autre, il y a le caucus du Québec, qui ne se cache plus pour faire valoir son opposition. Députée de Brossard–Saint-Lambert, Alexandra Mendès a déclaré au jeudi qu’une approbatio­n serait « absolument impensable » !

À cette extrême faiblesse du gouverneme­nt Trudeau devant la paralysie des transports s’ajoute un clivage croissant au caucus libéral suscité par l’autorisati­on ou non du projet bitumineux Teck Frontier en Alberta.

ROBITAILLE

L’ancien expert en manifestat­ion verte, Steven Guilbeault, devenu ministre du Patrimoine, a goûté hier à sa médecine : des écologiste­s ont occupé son bureau. Si le gouverneme­nt approuvait Teck, il se verrait contraint de songer à une sortie à la Nicolas Hulot, ministre français de l’Environnem­ent qui démissionn­a en 2018 avec fracas sur une question de principe.

Les conservate­urs devraient se dépêcher de se donner un chef. J’en mets un peu... mais au cas où.

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