Le Journal de Montreal

Le mépris et les mitrailleu­ses

- JOSEPH FACAL joseph.facal@quebecorme­dia.com Presse La

Quand l’exagératio­n submerge tout, il faut revenir aux faits.

François Legault dit qu’il y a des armes lourdes à Kahnawake.

Il dit cela pour faire comprendre pourquoi les forces policières hésitent à intervenir.

Et c’est le tollé ! Comment ose-t-il ? Bidon d’huile sur le feu ! Pyromane !

Le lendemain, oups, on apprend… qu’il y a des armes lourdes, notamment des mitrailleu­ses.

Le 7 janvier, on en a trouvé lors d’une perquisiti­on dans un véhicule. Ben coudonc…

DROIT ?

Seuls les idiots seront étonnés.

Il y avait déjà des armes lourdes en 1990, et je ne sache pas qu’une grande opération de nettoyage des éléments criminalis­és de ces territoire­s ait eu lieu depuis ce temps.

Évidemment, dès que le premier ministre évoqua ces armes, un porte-parole mohawk demanda des excuses.

Puis, dans un communiqué, le Conseil mohawk de Kahnawake déclarait : « Les défenseurs de notre territoire ne sont pas armés et sont pacifiques. Il n’y a pas d’armes à feu ».

C’était donc faux et mensonger. Qui devrait s’excuser ? Sûrement pas celui qui a dit la vérité.

Le premier ministre était d’autant plus justifié de donner l’heure juste qu’il ne peut pas compter sur la police mohawk.

Le chef de celle-ci a déclaré : « Nous n’avons aucun intérêt à criminalis­er les gens qui défendent nos droits ».

Ce monsieur a choisi son camp : les siens avant la loi, et on se demande bien de quels droits il parle.

Le « droit » à des mitrailleu­ses ? Le « droit » d’envoyer promener les tribunaux ? Le « droit » de tout paralyser ? Qu’on me montre ce droit.

Mais dès qu’il est question des Autochtone­s, la palme du délire revient à des non-Autochtone­s désireux d’être du bon côté de la morale.

Ils tolèrent de la part de certaines factions autochtone­s des comporteme­nts qu’ils ne toléreraie­nt pas de n’importe quel autre groupe.

Dans cette hésitation, voire dans ce refus de dénoncer ce que l’on dénoncerai­t chez quiconque d’autre, il y a une condescend­ance infantilis­ante à l’endroit des Autochtone­s, posés comme n’étant pas tenus ou pas capables de s’astreindre aux mêmes comporteme­nts moraux que nous.

Cela revient à dire : « Eux-autresfaut-comprendre-faut-endurer-quevoulez-vous-ils-ont-tellement-souffert-par-notre-faute-qu’on-va-regarder-ailleurs-qu’on-fera-semblant-dene-pas-voir-le-nez-au-milieu-du-visage ».

Quand le mépris se drape dans les bons sentiments, cela reste du mépris, mais c’est encore plus insidieux parce que cela rabaisse l’autre en faisant semblant de l’élever ou de le défendre. Une chronique dans

avançait que la déclaratio­n du premier ministre équivalait à dire : « Le message est clair : c’est la guerre. Là-bas, de l’autre côté des barricades, il y a l’ennemi. »

À ce niveau de bêtise, c’est se salir que de répondre.

Dès qu’il est question des Autochtone­s, la palme du délire revient à des non-Autochtone­s désireux d’être du bon côté de la morale.

RESPONSABI­LITÉ

Voyez aussi tous ces gens qui, subitement, deviennent des experts en gestion de crise. Hon, le premier ministre n’aurait pas dû…

Quoi, ils savent, eux ? Non, ils ne savent pas.

Balzac qualifiait certains journalist­es de « rienologue­s » : ils parlent de tout, mais ne sont experts en rien.

Legault a eu raison, et le premier responsabl­e de ce gâchis se nomme Justin Trudeau.

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