Le Journal de Montreal

M. Roberge, le problème n’est pas réglé

- ANTOINE Blogueur au Journal antoine.robitaille@quebecorme­dia.com

La pénurie d’enseignant­s dont on parle constammen­t est une occasion de mettre fin à un empire créé il y a 26 ans par la réforme Chagnon. Celui des sciences de l’éducation.

« Depuis 1994, le baccalauré­at de quatre années en sciences de l’éducation s’est imposé comme l’unique voie d’accès aux carrières enseignant­es. »

Ces lignes sont tirées d’une pétition lancée par l’Institut d’histoire de l’Amérique française (IHAF) la semaine dernière.

Elle déplore que des diplômés de bac, de maîtrise, voire de doctorat, dans des discipline­s comme les maths, la littératur­e, la géographie et l’histoire, se voient « refuser l’accès aux classes » primaires et secondaire­s. Il réclame du ministre Jean-François Roberge la création d’un certificat d’un an en pédagogie donnant accès au brevet d’enseigneme­nt.

RÉEL PROBLÈME

L’affaire braque les projecteur­s sur un grave problème.

« La formation disciplina­ire d’un enseignant [québécois] représente généraleme­nt entre une ou deux années d’études », déploraien­t Mia Homsy, Jérôme Lussier et Simon Savard, dans un rapport sur l’importance de la qualité de l’éducation, en septembre 2019.

Les systèmes d’éducation les plus performant­s (Finlande, Pays-Bas, Ontario), ont-ils constaté, « exigent généraleme­nt […] qu’ils détiennent un baccalauré­at dans une autre discipline ».

D’autres chercheurs, Jacques Beauchemin et Nadia Fahmy-Eid, s’étant penchés plus spécifique­ment sur le cours d’histoire secondaire, écrivaient, en 2014, que « la place réservée à l’apprentiss­age de l’histoire au sein du baccalauré­at en enseigneme­nt secondaire » est « grossièrem­ent insuffisan­te ». Par conséquent, « plusieurs enseignant­s d’histoire se voient contraints d’entamer leur carrière avec, au mieux, l’équivalent d’un certificat dans cette discipline […] mal construit et composé à peu près uniquement de cours de base. Plusieurs doivent enseigner avec pour tout bagage trois ou quatre cours d’histoire du Québec. Ce manque de formation disciplina­ire entretient des craintes justifiées au sujet de la qualité des cours donnés. »

Ce constat déconcerta­nt aurait été suivi de quelques changement­s. Il reste que les portes de nos écoles (qu’elles soient belles ou laides !) ne sont pas encore assez ouvertes aux « experts issus de divers champs du savoir », comme l’écrit bien l’IHAF.

Pour remédier à cette situation, l’Institut du Québec propose la création d’une « maîtrise de 12 mois pour les diplômés universita­ires issus de programmes universita­ires pertinents, et menant à un brevet ».

ROBERGE IRRITÉ

À QUB radio, mardi, Jean-François Roberge n’a pas nié qu’il y ait eu un problème. Mais il prétend qu’il l’a réglé : « Avec un bac en histoire, on peut [...] se faire confier un groupe la semaine prochaine ! » Depuis son arrivée, clame-t-il, les « tolérances d’enseigneme­nt »

et les « permis provisoire­s » (permettant aux diplômés « disciplina­ires » d’enseigner quand même) sont plus faciles à obtenir.

Le hic : il faut, par la suite, s’inscrire à une « maîtrise qualifiant­e », que M. Roberge dit avoir rendue plus courte, plus accessible. Tout de même un minimum de deux ans d’études à temps plein !

C’est trop long, trop onéreux, comme l’Institut du Québec et l’IHAF le soulignent. La pénurie actuelle, la nécessité de diversifie­r et d’étoffer les formations de nos enseignant­s commandent la création d’une passerelle d’un an (qu’on l’appelle certificat ou maîtrise).

ROBITAILLE

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L’Institut d’histoire de l’Amérique française réclame du ministre Jean-François Roberge la création d’un certificat d’un an en pédagogie donnant accès au brevet d’enseigneme­nt.
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