Les épiceries croulent sous les demandes de livraisons
Les restaurateurs, eux, en arrachent pas mal Confinés à la maison, les clients passent maintenant leurs commandes en ligne ou au téléphone
Si les services de livraison des épiceries montent en flèche, ça semble l’inverse pour des restaurateurs, qui subissent une chute importante d’appels de clients qui veulent se faire livrer de la nourriture à domicile.
« Normalement, on a environ 400 livraisons par jour, et là, c’est descendu à environ 220. La clientèle a vraiment baissé », explique Richard Bassila, copropriétaire du restaurant New System Bar-B-Q, dans Saint-Henri, à Montréal.
MOINS DE DÉPENSES
Avec le confinement volontaire, certains pourraient croire que la demande de repas livrés à domicile connaît une hausse importante. Or, il n’en est rien, explique M. Bassila. Il estime qu’avec toutes les pertes d’emploi et l’économie incertaine, beaucoup de gens préfèrent limiter leurs dépenses.
« La semaine dernière, c’était la folie dans les épiceries, les gens stockaient de la nourriture, dit-il. Alors, pourquoi dépenser au restaurant quand ils peuvent cuisiner à la maison ? Je peux les comprendre… »
Pour faire face à la crise de la COVID-19, M. Bassila explique avoir dû réduire les heures d’ouverture du restaurant. Mais il n’a mis à pied aucun de ses 22 livreurs, a-t-il assuré.
« Il y a beaucoup de temps partiel, et j’essaye d’équilibrer les horaires pour qu’ils gardent tous une job, dit-il. Mais l’achalandage a beaucoup baissé. Au moins, on reste ouvert. »
Les épiceries sont submergées par les commandes en ligne et téléphoniques et peinent à répondre aux demandes de clients, qui respectent les consignes en restant à la maison.
Au Marché Esposito de l’arrondissement SaintLaurent, à Montréal, le téléphone ne dérougit pas depuis le début de la crise de la COVID-19, confirme le gérant John Esposito.
« On a trois fois plus de commandes, si bien qu’on doit en refuser ; on n’arrive pas à toutes les prendre », explique-t-il.
Avant la crise, il avait une employée pour répondre à la demande. Elles sont maintenant deux. Et il aimerait en embaucher d’autres. Sauf que malgré les pertes d’emplois partout au Québec, il peine à trouver des employés.
« Le monde a peur de la COVID-19, ils ne veulent pas forcément travailler. Mais je peux les comprendre, je ne les blâme pas. »
Peter Mourelatos, de l’épicerie du même nom à Montréal, explique lui aussi que le nombre de commandes par courriel ou téléphone a explosé en une semaine.
CINQ FOIS PLUS
« Normalement, on fait 20 livraisons quotidiennes, là on est rendu au-delà de 100. Il y a presque trop de commandes », dit-il avec le sourire, tout en préparant celles reçues pendant qu’il s’entretenait avec Le Journal.
Pour répondre à la demande, il a dû recruter des bras pour épauler son seul livreur. Ils sont maintenant trois, mais M. Mourelatos envisage d’en embaucher deux autres.
Pour Franck Hénot, propriétaire de l’Intermarché Boyer, sur le Plateau Mont-Royal, pas question de laisser tomber les clients malgré la hausse vertigineuse de la demande.
« Nous sommes devenus indispensables pour nombre de gens confinés à la maison », insiste-t-il.
« Je livre gratuitement, car mes principaux clients par téléphone sont des personnes âgées, dit-il. Mes clients paient par carte de crédit au téléphone ou avec le terminal du livreur. Mes gérants font des semaines de sept jours, mais ça ne pourra pas durer comme ça pendant des mois. »
SITES EN PANNE
« Normalement, j’ai trois commandes par jour ; ce matin, j’en ai eu 17, souligne M. Hénot. C’est certain qu’avec l’aggravation de l’épidémie, les ventes n’arrêtent pas de monter. On bat des records. Et quand les sites web des grandes bannières plantent, nos commandes téléphoniques explosent. »
La hausse de la demande a effectivement causé des problèmes technologiques et les sites des principales bannières ont flanché ces derniers jours.
Plusieurs marchands confirment que le délai de livraison s’est allongé et qu’il varie désormais entre trois et cinq jours.
Certaines épiceries ne prennent d’ailleurs plus de commandes avant la semaine prochaine.