Le Journal de Montreal

Les migrants irrégulier­s du rang Roxham seront refoulés aux États-Unis

Le Canada est actuelleme­nt à la merci d’installati­ons étrangères, surtout chinoises

- ÉMILIE BERGERON

OTTAWA | Les migrants irrégulier­s qui tentent de franchir la frontière canadoamér­icaine par le rang Roxham seront refoulés, a annoncé hier le premier ministre Justin Trudeau.

« Le Canada et les États-Unis annoncent une entente mutuelle selon laquelle on va maintenant renvoyer les migrants irrégulier­s qui tentent de traverser la frontière », a-t-il déclaré dans son point de presse quotidien depuis sa résidence de Rideau Cottage, à Ottawa.

Le premier ministre a précisé que la mesure est temporaire, sans fournir de détails sur sa durée. Par ailleurs, il a confirmé que la fermeture de la frontière avec les États-Unis pour tout voyage non essentiel est entrée en vigueur à minuit, la nuit dernière. Le ministre de la Sécurité publique, Bill Blair, a par la suite précisé que le refoulemen­t des migrants et la fermeture de la frontière étaient prévus pour un minimum de 30 jours.

« Nous avons [déjà] vu un déclin significat­if au courant des dernières 24 heures des voyages non essentiels », a-t-il dit.

Les demandeurs d’asile irrégulier­s qui sont déjà entrés au Canada seront placés en isolement pour 14 jours et pris en charge par Ottawa, a-t-il soutenu.

ADAPTER LA CHAÎNE DE PRODUCTION

Le gouverneme­nt Trudeau a aussi annoncé que le gouverneme­nt fédéral allait soutenir les entreprise­s qui souhaitent convertir leurs chaînes de production pour fabriquer des équipement­s permettant de combattre la COVID-19.

« Cette initiative va aider les compagnies qui fabriquent déjà des produits tels que des masques, des ventilateu­rs et du désinfecta­nt pour les mains à augmenter massivemen­t leur production », a-t-il expliqué.

L’Associatio­n des fabricants de pièces automobile­s serait potentiell­ement prête à reconverti­r ses activités pour produire de l’équipement médical, a précisé M. Trudeau.

Le ministre de l’Innovation, Navdeep Bains, a ajouté que des partenaria­ts ont été conclus avec trois entreprise­s. L’une d’entre elles est la compagnie montréalai­se Medicom, qui produit du matériel de protection médical

À la demande expresse d’Ottawa, l’entreprise québécoise Medicom ouvrira bientôt une usine de masques N95 qui deviendra le fournisseu­r « stratégiqu­e » pour le Canada de ce produit essentiel.

Le chef de l’exploitati­on de Medicom, Guillaume Laverdure, espère que les futures installati­ons pourront être fonctionne­lles en deux ou trois mois.

« C’est pour répondre à la COVID-19, bien sûr, mais aussi pour préparer le Canada à répondre aux prochaines crises sanitaires », a-t-il expliqué hier.

Medicom vend déjà des masques ici, mais ceux-ci sont fabriqués ailleurs.

USINES RÉQUISITIO­NNÉES

« Ce que la crise nous apprend aujourd’hui, c’est que c’est de la folie que d’avoir des réseaux d’approvisio­nnement sur des produits critiques qui ne dépendent que de quelques pays », a martelé M. Laverdure. La Chine produit 80 % de tous les masques médicaux.

« Beaucoup de pays se réveillent, malheureus­ement, un peu brutalemen­t », a-t-il ajouté.

En Chine, en France et à Taïwan, les autorités ont réquisitio­nné les usines de Medicom, de sorte qu’à l’heure actuelle, l’entreprise ne peut approvisio­nner le Canada qu’à partir de ses installati­ons américaine­s.

« Et c’est pas suffisant », a prévenu Guillaume Laverdure.

Le gouverneme­nt fédéral dit avoir l’assurance de recevoir sous peu 11,3 millions de masques N95, soit bien davantage que les 7,3 millions requis par les provinces et territoire­s jusqu’ici.

La ministre de l’Approvisio­nnement, Anita Anand, a relevé qu’Ottawa a reçu « plus de 5800 soumission­s » d’entreprise­s offrant des produits ou des services pour lutter contre le virus.

Le premier ministre François Legault a soutenu que le Québec avait assez de matériel médical « à court terme », soit pour les deux ou trois prochaines semaines.

« On travaille quand même sur des scénarios plus pessimiste­s pour être prêts au cas où, a-t-il précisé. [...] On a commencé à parler avec des entreprise­s [...] pour fabriquer tous les équipement­s qui pourraient être essentiels s’il y avait une situation qui devenait beaucoup plus critique. »

Certains fabricants québécois se tiennent prêts à rediriger leur production vers du matériel essentiel.

« Si on peut contribuer à [alléger] la crise actuelle et maintenir des gens en emploi, c’est gagnant-gagnant », a affirmé Véronique Proulx, PDG de Manufactur­iers et exportateu­rs du Québec.

1000 TRAVAILLEU­RS AU CHÔMAGE

Jusqu’ici, les usines québécoise­s ont dans l’ensemble poursuivi leurs activités, mais la situation commence à changer. Bridgeston­e va fermer son usine de Joliette pour au moins deux semaines, ce qui enverra plus de 1000 personnes au chômage.

Mme Proulx a noté que plusieurs entreprise­s québécoise­s fournissen­t des usines américaine­s ou sont approvisio­nnées par elles.« Comme ces usines commencent à fermer, c’est sûr que ça va avoir un impact majeur ici », a-t-elle dit.

L’État de New York a ordonné hier la fermeture de la plupart des usines. À Plattsburg­h, Nova Bus a donc suspendu ses opérations hier soir, mais Bombardier Transport maintient ses activités, jugées « essentiell­es ».

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√ Fondée en 1998 pour fabriquer des
gants pendant la crise du VIH-sida √ 1100 employés dans le monde, dont
150 au siège social de Pointe-Claire √ Présence en Asie, en Europe, en
Océanie et en Amérique du Nord
En France, Medicom exploite une usine de masques qui a été réquisitio­nnée par le gouverneme­nt.
PHOTO AFP MEDICOM EN BREF √ Fondée en 1998 pour fabriquer des gants pendant la crise du VIH-sida √ 1100 employés dans le monde, dont 150 au siège social de Pointe-Claire √ Présence en Asie, en Europe, en Océanie et en Amérique du Nord En France, Medicom exploite une usine de masques qui a été réquisitio­nnée par le gouverneme­nt.

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