Seul un vaccin permettra une « normalité », estime l’ONU
Cela « sauverait des millions de vies et des milliards innombrables de dollars »
NEW YORK | (AFP) Contre la COVID-19, « un vaccin sûr et efficace pourrait être le seul outil permettant un retour du monde à un sentiment de “normalité” », a estimé hier le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, en l’espérant avant la fin de l’année.
Un tel vaccin « sauverait des millions de vies et des milliards innombrables de dollars », a-t-il ajouté lors d’une visioconférence avec la cinquantaine de pays africains membres de l’Organisation.
Il a notamment plaidé pour une accélération de son développement et son accessibilité à tous. Il doit être « universel » et « permettre de contrôler la pandémie ».
Épidémiologistes, virologues, experts en santé publique s’accordent à dire que seules des campagnes de vaccination massives parviendraient à stopper efficacement l’épidémie de COVID-19.
TRAITEMENTS INEFFICACES
« La mise au point et la distribution d’un vaccin sûr et efficace vont être nécessaires pour interrompre totalement la transmission », souligne le patron de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus.
Les mesures de confinement et distanciations sociales sont coûteuses, difficiles à tenir sur la durée pour être efficaces à moyen ou long terme.
Les traitements s’avèrent pour l’heure inefficaces à sauver des formes sévères de la COVID-19 caractérisées par des pneumonies et des emballements mortels du système immunitaire.
Une vaccination massive et réussie permettrait d’immuniser un pourcentage élevé de la population, ce qui empêcherait le virus SRAS-Cov-2 de circuler et stopperait l’épidémie. Cela a déjà été le cas par le passé, sur une période bien plus longue, pour la variole, autre maladie virale sans traitement efficace, rayée de la carte des maladies depuis 1980 grâce aux vaccins.
GRANDES DIFFICULTÉS
Le séquençage complet du génome du nouveau coronavirus à la mi-janvier 2020, puis la dissémination mondiale de la maladie, ont mis en ébullition tout ce que la planète compte en laboratoires de recherche sur les vaccins.
Les grands noms de la pharmacie et une myriade de laboratoires de biotechnologies sont sur les rangs : plus de 100 projets de vaccins seraient actuellement en développement, selon François Balloux, chercheur à University College de Londres.
Première difficulté : le virus ciblé. « Jusqu’à présent, personne n’a jamais fait un vaccin efficace contre un coronavirus humain », souligne l’ex-directeur de l’INSERM (Institut national de la santé et de la recherche médicale), le virologue Christian Bréchot.
« Les cimetières sont pleins de candidats
vaccins qui n’ont jamais marché », confie au journal britannique The Guardian Jonathan Heeney, chercheur canadien à la tête de la biotech DIOSynVax, sur les rangs pour élaborer un vaccin anti-COVID.
Une difficulté pour mettre au point un vaccin sûr tient à une caractéristique de la maladie dans ses cas graves : la sur-réaction de la réponse immunitaire avec ses « orages de cytokine », production trop abondante de substances inflammatoires pouvant tuer.
Comment stimuler avec un vaccin la réaction antivirale sans conduire à un emballement dangereux de la machinerie immunitaire ? « Dans ce phénomène, on n’a pas encore bien compris le rôle joué par les anticorps », reconnaît Frédéric Tangy, spécialiste des vaccins à l’Institut Pasteur.
Difficulté supplémentaire : les coronavirus sont des virus à ARN qui ont la particularité de « muter beaucoup », selon le chercheur français.
Ceci rend plus ardue la mise au point d’un vaccin ciblé. C’est pourquoi Pasteur
travaille aussi sur un « vaccin universel contre les coronavirus », dirigé contre des protéines communes à cette famille de virus, explique-t-il.
POUR 2020 OU 2021 ?
« [...] Le succès à l’automne est possible si tout va à la perfection », confie au journal britannique la spécialiste britannique des vaccins Sarah Gilbert, professeure à l’Université d’Oxford et déjà engagée avec sa biotech Vaccitech sur des essais.
Il est logique de vouloir lancer un vaccin dès l’automne 2020 avant une éventuelle vague hivernale de COVID-19 dans l’hémisphère nord.
Prudente, l’Agence européenne des médicaments indique : « le calendrier pour le développement de vaccins est difficile à prédire. Se basant sur l’expérience passée, cela pourrait prendre au moins un an avant qu’un vaccin ne soit prêt à être approuvé et disponible en quantité suffisante pour permettre un usage étendu ».