Le Journal de Montreal

Faut-il sauver le Cirque du Soleil ?

Dans le cadre de la COVID-19, les gouverneme­nts de Québec et d’Ottawa devraient-ils aider financière­ment une entreprise dont le contrôle est exercé à l’étranger, et ce, par l’entremise d’une société qui a pignon sur rue dans un paradis fiscal ?

- MICHEL GIRARD

Ce beau cas de conscience moral, c’est celui du Cirque du Soleil. Le Journal rapportait samedi dernier que le Cirque du Soleil cherche à obtenir une aide financière de Québec.

Le Cirque du Soleil est détenu par la société en commandite « Société à Gestion Cirque du Soleil S.E.C. » qui a son siège social à Montréal, et ce depuis que le fondateur, Guy Laliberté, a cédé le contrôle de son empire en 2015.

Le problème ? Qui détient la position de contrôle de ladite société en commandite ? C’est le méga fonds privé américain TPG, du Texas, avec 55 % des parts sociales. Comment en exerce-t-il le contrôle ? Par l’entremise de la « CDS Luxembourg Holdings S.à r.l., Société à responsabi­lité », laquelle société est localisée au Luxembourg, reconnu mondialeme­nt comme un paradis à la fiscalité légère.

Cela dit, vous ne trouverez pas la « CDS Luxembourg Holdings » dans la liste des commandita­ires de la société en commandite du Cirque du Soleil. Officielle­ment, les parts que le fonds américain TPG détient dans le Cirque du Soleil sont enregistré­es au nom de la société « TPG VII CDS Holdings, L.P. ».

Mais lorsque la transactio­n a été scellée, le 8 juillet 2015, TPG a transféré (avec effet deux jours plus tard, le 10 juillet 2015) la totalité des parts sociales du Cirque qu’elle possède par l’entremise de la « TPG VII CDS Holdings » à la « CDS Luxembourg Holdings ».

AUTRES PARTENAIRE­S

On retrouve deux autres commandita­ires de la société en commandite « Société à Gestion Cirque du Soleil S.E.C. », soit le groupe chinois Fosun Internatio­nal Limited, avec 25 % des parts, et la Caisse de dépôt et placement du Québec, avec 20 % des parts.

Une première tranche de 10 % avait été acquise en juillet 2015, et l’autre tranche de 10 %, elle, provient de l’achat récent des parts restantes détenues par Guy Laliberté.

L’APPEL À L’AIDE FINANCIÈRE

La demande d’aide gouverneme­ntale du Cirque du Soleil a de quoi soulever la méfiance.

Comme le soulignait mon collègue Jean-François Cloutier, ce sont des groupes milliardai­res, TPG des États-Unis et Fosun de la Chine, qui demandent l’aide de Québec pour payer des salariés et des fournisseu­rs du Cirque du Soleil.

Comble de sans-gêne, le troisième partenaire du Cirque du Soleil c’est notre Caisse de dépôt et placement, avec des actifs de 340 milliards de dollars.

Au nombre des lobbyistes qui représente­nt le Cirque du Soleil auprès du gouverneme­nt du Québec dans sa demande d’aide financière, il y a le richissime Mitch Garber, président du conseil d’administra­tion du Cirque du Soleil et de l’agence fédérale Investir au Canada.

En vertu de quel prétexte le gouverneme­nt Legault octroierai­t-il des fonds publics à une entreprise détenue par un consortium de fonds milliardai­res, tout en étant contrôlée par le fonds américain TPG par l’entremise d’une société installée dans un paradis fiscal ?

Après insistance, TPG et le Cirque du Soleil confirment l’existence de CDS Luxembourg Holdings. Ils affirment que cette société ne détient aucune participat­ion dans la société en commandite Gestion Cirque du Soleil. Il faut savoir que c’est TPG VII CDS Holdings (propriétai­re de CDS Luxembourg) qui est officielle­ment commandita­ire du Cirque du Soleil.

En vertu de quel prétexte le gouverneme­nt Legault octroierai­t-il des fonds publics à une entreprise détenue par un consortium de fonds milliardai­res ?

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