Le Journal de Montreal

Les classes trop petites

Pas plus de 8 à 10 enfants par local en raison des règles de distanciat­ion

- DAPHNÉE DION-VIENS

Les directeurs d’école craignent de manquer de place et de personnel pour accueillir tous les élèves qui voudront revenir en classe puisqu’en respectant la distance de deux mètres, la majorité des locaux ne pourront accueillir que 8, 9 ou 10 enfants par groupe, affirment-ils.

Selon les règles de la santé publique, le retour en classe à partir du 11 mai devra se faire avec un maximum de 15 élèves par local et une distance de deux mètres.

Ruban à mesurer en main, le directeur d’une école primaire de Dolbeau-Mistassini, Francis Côté, a fait ses calculs. Résultat : dans la grande majorité de ses classes, impossible de se rendre à dix élèves par local en respectant la distance imposée. « On oublie ça », lance-t-il.

Le constat est le même dans plusieurs écoles, affirme Nicolas Prévost, président de la Fédération québécoise des directions d’établissem­ent d’enseigneme­nt.

SOLUTIONS

Les questions fusent de toutes parts, ditil. Que faire avec les élèves qui voudront revenir pour qui il n’y aura pas de place ?

Le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, a évoqué la possibilit­é d’utiliser les locaux des écoles secondaire­s qui resteront fermées, mais il s’agit d’une solution difficile à mettre en place, notamment en région, où plusieurs écoles primaires sont situées loin d’une école secondaire, fait valoir M. Prévost.

Il faudra aussi trouver du personnel pour enseigner à tous ces petits groupes d’élèves. La pénurie était déjà bien réelle avant la pandémie et plusieurs enseignant­s demeureron­t à la maison pour des raisons de santé, rappelle M. Prévost.

Il fallait s’y attendre. La réouvertur­e des écoles pour le préscolair­e et le primaire au Québec, dans deux ou trois semaines, pose de nombreuses questions légitimes. Depuis hier, des dizaines de parents, d’enseignant­s et d’éducatrice­s ont d’ailleurs fait part au Journal Journal de leurs préoccupat­ions sur ce retour en classe ou en garderie hors du commun. Nos journalist­es répondent à plusieurs de vos interrogat­ions. Apprendre à distance Pour les enfants qui doivent rester à la maison pour des raisons de santé, est-il possible d’installer un système de caméra pour qu’ils puissent suivre le professeur de la maison ? – Stéphanie

Les élèves qui ne se rendront pas à l’école devront suivre un enseigneme­nt à distance. Des plans de travail seront fournis par les enseignant­s, qui continuero­nt aussi de remettre les « trousses pédagogiqu­es » du ministère.

L’heure du lunch Pour les dîners, il y avait 200 enfants assis à des tables en même temps. C’est impossible d’avoir une distance de deux mètres. Que va-t-on faire ? – Rose-Marie, enseignant­e au primaire

Les écoles devront limiter les déplacemen­ts dans le bâtiment, minimiser les moments où tous les groupes se déplacent en même temps et opter pour des horaires décalés. Ils auront un même local réservé aux classes, au dîner et au service de garde. Ils fréquenter­ont la cour de récréation à tour de rôle. Les élèves devront se laver les mains régulièrem­ent et limiter les contacts physiques entre eux.

Appliquer la limite des 15 élèves Qu’est-il prévu si plus de 15 élèves du même groupe veulent retourner en classe ? – Sarah, enseignant­e de français langue seconde

Le gouverneme­nt affirme que « divers moyens » sont envisagés pour ce cas de figure. Notamment, l’école pourrait réorganise­r la compositio­n des groupes du même niveau pour s’assurer que chaque groupe a un nombre maximal de 15 élèves – et même moins si le local qui les accueillee­st trop petit. Chaque groupe occupera le même local jusqu’à la fin de l’année scolaire. En cas de besoin, les locaux d’écoles secondaire­s voisines (qui demeurent fermées jusqu’au 1er septembre) pourraient être mis à profit.

Ce qui sera enseigné En quoi consistera l’enseigneme­nt ? Nouvelle matière ? Révision ? – Sophie Carignan, enseignant­e au primaire dans le Centre-du-Québec

D’ici la fin de l’année scolaire, l’encadremen­t pédagogiqu­e des élèves, qu’ils soient de retour en classe ou restent à la maison, aura comme principal objectif de consolider les apprentiss­ages essentiels au passage au niveau supérieur.

Difficulté­s surmontabl­es Comment seront évalués les élèves qui étaient en échec dans certaines matières au deuxième bulletin ? Auront-ils la chance de prouver qu’ils ont progressé ? – Nathalie Courcy, Gatineau

Le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, a déclaré, lundi, qu’un élève du secondaire qui a bien réussi lors des deux premières étapes n’est pas en danger d’échouer son année, alors qu’un élève qui était en grande difficulté « pourrait la sauver » s’il démontre à son enseignant qu’il s’est rattrapé à l’aide des outils à sa dispositio­n. M. Roberge n’a pas été aussi clair en ce qui concerne l’évaluation des élèves du primaire, mais il a insisté sur l’importance du jugement profession­nel des enseignant­s. Certains pourraient décider d’évaluer les apprentiss­ages à l’aide de travaux ou par des échanges en direct avec les élèves. Les épreuves ministérie­lles sont annulées et la présentati­on du bulletin de troisième étape pourrait être différente.

La date limite pour se décider Je voudrais garder mon fils à la maison un peu plus longtemps pour voir comment se déroulent les choses. Est-ce que je dois prendre une décision immédiatem­ent ? – Cathy

Le ministre Roberge a demandé aux parents qui souhaitent renvoyer leur enfant à l’école préscolair­e ou primaire d’en aviser l’établissem­ent au moins une semaine à l’avance afin de bien préparer l’accueil des élèves. Si vous n’êtes pas prête à prendre cette décision, il serait judicieux d’en discuter avec votre direction d’école.

Selon le portail du gouverneme­nt, les parents pourront décider de renvoyer leur enfant à l’école après le 11 mai, mais ils devront en informer la direction de leur établissem­ent scolaire dans des délais raisonnabl­es. Cette décision, sauf exception, devra être maintenue, dans la mesure du possible, jusqu’à la fin des classes.

Gardez en tête que cette décision vous appartient.

Conditions médicales particuliè­res Je suis une enseignant­e dans la cinquantai­ne et je fais de l’asthme. Je vis avec ma mère octogénair­e, un de mes fils est immunosupp­rimé et mon autre fils est asthmatiqu­e. Est-ce que je serai obligée de retourner enseigner à l’école ? – Michèle, Québec

Les enseignant­s qui ont une vulnérabil­ité sur le plan de la santé (maladie chronique, déficit immunitair­e grave, grossesse ou allaitemen­t, personne âgée de 60 ans ou plus) ont la recommanda­tion de ne pas se rendre à l’école et de fournir une prestation de travail à partir de chez eux. En ce qui concerne les enseignant­s qui aimeraient demeurer en confinemen­t, non pas pour protéger leur santé, mais pour protéger celle d’un membre de leur famille, le ministère de l’Éducation n’a pas été en mesure de nous fournir une directive claire hier.

Masques : pas pour tous Compte tenu de la proximité physique presque incontourn­able avec les plus jeunes élèves, pourquoi Québec ne veut-il pas fournir des masques « efficaces » aux enseignant­es et enseignant­s ? – Jean-Marie Comeau, retraité de l’éducation, Longueuil

Le gouverneme­nt fournira des masques aux employés des services de garde, mais pas aux enseignant­s du

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primaire. Selon le ministre Jean-François Roberge, c’est parce que « c’est un contexte qui est différent » et que « la grandeur des locaux n’est pas la même ». Par exemple, « une classe de maternelle est beaucoup plus grande qu’un local de CPE ou de garderie », a-t-il fait valoir à TVA Nouvelles, hier, tout en laissant entendre que la santé publique n’a pas encore complèteme­nt tranché cette question. Cela dit, « si un enseignant est plus à l’aise avec un masque, on ne l’empêchera pas de le porter », a-t-il précisé.

Mesures sanitaires rehaussées

Quelles sont précisémen­t les mesures de désinfecti­on et de nettoyage qui devront être prises dans les écoles ? – Nancy, enseignant­e dans la région de Québec Solutions hydroalcoo­liques, savon et papier à main jetable à profusion, le gouverneme­nt du Québec, sur son site web, explique que tout sera fait pour favoriser le lavage des mains très fréquemmen­t, notamment à l’entrée à l’école, ou encore avant et après chaque récréation. En plus des règles des deux mètres et de la limite de 15 élèves par classe, les locaux seront nettoyés « quotidienn­ement » tandis que les salles de bain et les surfaces comme les poignées de porte, les interrupte­urs, les bureaux de travail, les micro-ondes ou encore les abreuvoirs seront nettoyés « plusieurs fois par jour », peut-on lire.

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 ?? PHOTO COURTOISIE ?? À l’école Notre-Dame-des-Anges, à Dolbeau-Mistassini, le directeur d’école Francis Côté estime qu’il est impossible de faire entrer 10 élèves dans la majorité de ses classes. Cette classe d’anglais (sur la photo), où il y a plus d’espace que dans une classe courante, permet d’accueillir 11 élèves, a-t-il mesuré.
PHOTO COURTOISIE À l’école Notre-Dame-des-Anges, à Dolbeau-Mistassini, le directeur d’école Francis Côté estime qu’il est impossible de faire entrer 10 élèves dans la majorité de ses classes. Cette classe d’anglais (sur la photo), où il y a plus d’espace que dans une classe courante, permet d’accueillir 11 élèves, a-t-il mesuré.

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