Le Journal de Montreal

Au tour d’Yvon Lambert d’affronter le cancer

Vingt-quatre heures après avoir été opéré pour un cancer du côlon, l’ancien joueur du CH retourne chez lui

- MICHEL BEAUDRY Collaborat­ion spéciale

Ils ont été et resteront des héros, des légendes. Près de 50 ans après leurs exploits et hauts-faits, on les idolâtre encore et on profite du vide de contenu provoqué par la pandémie pour se repasser à la télé les nombreux moments homériques qu’ils ont dessinés dans l’histoire.

Ils étaient glorieux, invincible­s, caractérie­ls et formidable­s. Ils le sont encore.

Il y a deux semaines, dans le plus grand secret, Yvon Lambert a été opéré pour un cancer du côlon. Véritable force de la nature, le lendemain de la chirurgie il était de retour à la maison avec Danielle, sa femme.

« Les médecins voulaient que je me remette en marche le plus vite possible, mais en même temps, ils ne voulaient pas me voir traîner dans les corridors de l’Hôpital Général. Danielle est venue me chercher, et du même coup elle est devenue mon infirmière personnell­e. »

UN MOT QUI EFFRAIE

Yvon a mis plus de deux mois avant de parler ouvertemen­t de son cancer : « Oui, le mot cancer fait peur. Mais tout de suite j’ai pensé à Pointu (Guy Lapointe) qui, depuis plus d’un an, combat un cancer de la langue, et il est sur la bonne voie. Puis j’ai aussi tout de suite pensé à Flower (Guy Lafleur), qui est passé très proche de la mort. Après ça, tu te dis, moi aussi, je veux me battre », a dit l’ancien numéro 11 du CH.

Les deux Guy ont inspiré le grand Lambert et il subsiste entre ces vieux compagnons d’armes une solidarité, une fraternité touchante et durable.

FRÈRES D’ARMES

Quand un des leurs mange un mauvais coup, c’est pas long que le téléphone sonne. Le grand Serge (Savard), Yvan (Cournoyer), Butch (Pierre Bouchard), Pointu, Pinotte (Réjean Houle),

Flower ou le Bleuet (Mario Tremblay) font rapidement sentir leur présence, leur appui. Il y a un lien indéfectib­le ou probableme­nt un vieux réflexe de partager quand il y a de la douleur. Nous, on les aime, alors imaginez comment eux ils s’aiment.

En plus, les grands champions des années 70 viennent de perdre Henri et ils sont encore à fleur de peau.

IL NE LÂCHERA PAS

Pierre Bouchard a su immédiatem­ent qu’Yvon Lambert se mettrait à la tâche pour combattre ce cancer quand il a vu son ex-coéquipier couper complèteme­nt la bière trois jours avant son opération. « C’était évident qu’Yvon ne se laisserait pas abattre, surtout avec l’exemple de grand courage de Guy Lapointe qu’il a sous les yeux. »

Ces gars-là se connaissen­t comme s’ils s’étaient tricotés et d’aucuns s’entendent pour dire que tu as besoin de te lever de bonne heure si tu veux coucher Lambert.

« On est presque tous restés très proches les uns des autres et ça restera toujours » a dit Pierre Bouchard, racontant aussi que, lorsque Serge Savard l’a appelé la semaine dernière, il lui a dit : « On nous recommande de téléphoner à des vieux, fait que je t’appelle… » Serge est deux ans plus âgé que Butch.

ET LA BONNE BIÈRE

Dans un peu plus d’une semaine, le 20 mai, Yvon Lambert célébrera ses 70 ans. Il aura été un plombier de luxe complétant sept saisons de plus de 20 buts en neuf ans dans la NHL. Il a remporté le championna­t des marqueurs de la Ligue Américaine avec les Voyageurs de la Nouvelle-Écosse, en plus de gagner la Coupe Calder. Avec le Canadien, quatre fois consécutiv­es il a mis son nom sur la Coupe Stanley.

Il y avait précisémen­t 41 ans hier qu’Yvon Lambert réussissai­t un but que les plus âgés partisans n’oublieront jamais.

Il a complété une passe de Mario Tremblay, procurant ainsi la victoire et éliminant du même coup les Bruins de Boston en prolongati­on dans le 7e match de la finale de conférence.

Il est devenu ensuite une figure légendaire du Tricolore représenta­nt l’équipe dans une foule d’événements, de promotions. Ayant appris de son père, il peut aussi faire le travail d’encanteur.

Reconnu depuis des lunes comme un indomptabl­e et grand buveur de la bonne bière, les gens qui l’ont côtoyé savent très bien qu’Yvon n’a jamais eu peur d’une petite caisse de 12, même pas d’une 24.

À son meilleur et dans les grandes chaleurs (!), une bière aux quinze minutes n’était même pas un obstacle.

« Yvon et la bière, c’était devenu du folklore », ajoute Pierre Bouchard.

Plusieurs auront peut-être du mal à croire les prochaines lignes.

Yvon a décidé de modifier ses habitudes, et maintenant, quand il a siroté deux, trois ou, au pire, quatre petites froides dans une journée, c’est tout. Il a réussi, et le plus étonnant, sans aucune difficulté.

« BEAU COMME UN COEUR »

Le grand ailier gauche a jusqu’à maintenant perdu plus de 20 livres et il se tape du vélo stationnai­re tous les jours. Danielle est ravie : « Il est beau comme un coeur, tout mince. »

Inséparabl­e et ensemble depuis plus de 20 ans, le couple a officialis­é son amour l’été dernier dans un somptueux mariage à L’Auberge Godfroy. De la famille, des amis et, encore une fois, un groupe d’anciens guerriers glorieux sont venus témoigner leur affection.

Yvon Lambert, c’est connu, est un amant de la vie, un vrai gai luron. Il a déjà hâte que les activités reprennent afin de retrouver le monde, son monde.

« Le numéro 11 dans votre programme. Le numéro un dans votre coeur », disait-on dans le temps.

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada