Le Journal de Montreal

Première gaffe du nouveau PDG de la Caisse de dépôt

- MICHEL GIRARD

Sous Michael Sabia, la Caisse a cédé RONA et CAMSO aux étrangers, Transat à Air Canada, Bombardier Transport à Alstom… en plus d’acheter des trains indiens pour le REM au détriment de nos trains de Bombardier assemblés à La Pocatière.

Le nouveau PDG de la Caisse, Charles Émond, lui, signe sa première gaffe en ayant permis à la Caisse, qui est le principal actionnair­e de SNC-Lavalin, de voter la semaine dernière contre la propositio­n du Mouvement d’éducation et de défenses des actionnair­es (MÉDAC) demandant au conseil d’administra­tion de SNC de s’engager à conserver le siège social de la société au Québec.

Comme la propositio­n a été rejetée par 98 % des votes des actionnair­es, c’est donc dire qu’à partir du mois d’août 2024, SNC-Lavalin pourra déménager son siège social dans une autre province canadienne si elle le juge opportun.

En vertu d’une convention d’investisse­urs conclue en juillet 2017 avec la Caisse à la suite d’un investisse­ment majeur, SNC s’était engagée envers la Caisse à faire en sorte que pendant 7 ans le siège social de la société demeure à Montréal.

C’est en raison de la fin de ce délai d’ici 4 ans que le MÉDAC souhaitait voir le conseil d’administra­tion de SNC prolonger à long terme l’engagement temporaire pris en 2017.

DES CONSÉQUENC­ES

La propositio­n de maintien du siège social étant maintenant rejetée, rien n’obligera SNC à maintenir son siège social au Québec à compter d’août 2024 et qu’en conséquenc­e, le fleuron québécois de l’ingénierie pourra déménager son siège social dans une autre province.

C’est ce que stipule l’article 2 du « Règlement 2005-1 » de SNC : « La Société peut quand elle le juge opportun… changer le lieu où le siège social est situé à une autre province au Canada. »

Contrairem­ent à ce que j’écrivais jeudi dernier, les actionnair­es de SNC n’avaient finalement pas besoin d’adopter une nouvelle résolution pour donner le feu vert au transfert du siège social hors Québec puisque le règlement 2005-1 permettait déjà un tel transfert.

Voilà pourquoi, il était si important de faire adopter la propositio­n du MÉDAC demandant au conseil d’administra­tion « un engagement ferme et formel » quant au maintien du siège au Québec. Question d’empêcher SNC de passer à l’acte en déménagean­t éventuelle­ment ses pénates.

LES ARGUMENTS DE LA CAISSE

Voici les arguments évoqués par la Caisse pour voter CONTRE la propositio­n pro-Québec du MÉDAC demandant au conseil d’administra­tion de SNC un engagement ferme et formel de maintenir le siège social au Québec.

« Au fond, nous partageons l’esprit

1 et le sens de la propositio­n du MÉDAC, par rapport aux attentes de la Caisse », m’explique le porte-parole de la Caisse, Maxime Chagnon.

Mais ajoute-t-il…

« Bien sûr, c’est facile à dire, obtenir

2 un engagement pour toujours ou pour l’éternité, mais on se doit de travailler dans un monde réaliste. Tu sais très bien - même si nous partageons tous l’objectif que le siège social de SNC demeure au Québec - que pas une entreprise ne prendrait un tel engagement qui la priverait de toute faculté de décision sur la répartitio­n de ses effectifs. »

« De plus, il ne faut pas oublier

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qu’un conseil d’administra­tion diversifié d’une société a un devoir de fiduciaire et un tel engagement pour l’éternité entrerait aussi en collision avec son devoir de fiduciaire. On peut bien discuter longtemps de toutes sortes de scénarios hypothétiq­ues, mais SNC est une entreprise mondiale bien enracinée au Québec, depuis fort longtemps. »

« Par rapport au règlement de 2005

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auquel tu faisais allusion, nous préférons avoir obtenu 7 ans en 2017, qui est une durée raisonnabl­e dans un monde réaliste, que rien du tout. »

PAS FORT

Vous remarquere­z que la Caisse défend fort bien les intérêts du conseil d’administra­tion de SNC qui s’oppose à la propositio­n du MÉDAC ! Le problème ?

Quand une société est sous l’emprise d’un conseil d’administra­tion dominé par des administra­teurs hors Québec, comme c’est le cas chez SNC, on s’entend-tu pour dire que le « Maître chez nous » a peu de poids dans les décisions.

Sur les 11 membres du conseil d’administra­tion de SNC, seulement trois sont du Québec. Sur les huit autres, quatre sont de l’Ontario, trois des États-Unis et un de Paris.

En votant « CONTRE » un engagement ferme de maintien du siège social de SNC au Québec, Charles Émond lance un très mauvais message.

Il a joué le jeu des autres grands actionnair­es de SNC qui ont tous voté contre ladite propositio­n pro-Québec, dont RBC Global Asset (Banque Royale), Jarislowsk­y Fraser (Scotia Bank), Fidelity, Vanguard, etc.

En tant que PDG de la Caisse, M. Émond devrait plutôt, chaque fois que l’occasion se présente, affirmer haut et fort auprès des grands investisse­urs institutio­nnels et des conseils d’administra­tion que le maintien à long terme au Québec des sièges sociaux est capital pour nous. En votant contre la propositio­n du MÉDAC de maintenir à long terme le siège social de SNC au Québec, Charles Émond a carrément tiré dans les pieds de François Legault qui compte pourtant sur lui pour que la Caisse protège mieux nos sièges sociaux.

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PDG de la Caisse de dépôt et placement du Québec
Charles Émond PDG de la Caisse de dépôt et placement du Québec
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