Fermer l’île de Montréal aurait été pratiquement impossible
Les autorités redoutaient des files d’attente interminables aux ponts
La santé publique a rapidement envisagé de fermer tous les ponts de Montréal au début de la pandémie de coronavirus, mais cette solution a été écartée, car elle aurait été pratiquement impossible à mettre en place.
Le 23 mars, soit 10 jours après le début de la crise, le chef de la police de Montréal, Sylvain Caron, a mandaté l’inspecteur-chef Mohamed Bouhdid pour préparer le confinement de l’île.
Les forces de l’ordre voulaient être prêtes à empêcher l’accès à l’île de Montréal via les 16 ponts qui la relient à l’extérieur, sauf pour les travailleurs des services essentiels.
À ce moment-là, Montréal n’était pas encore devenue l’épicentre de la pandémie, comme c’est le cas aujourd’hui. On comptait moins de 500 cas positifs, et le premier décès allait y être enregistré deux jours plus tard.
Le commandement de l’opération aurait été assuré conjointement avec la Sûreté du Québec (SQ), qui a juridiction sur la majorité des routes et autoroutes qui donnent accès à Montréal. À la SQ, c’est l’inspecteur-chef André Santerre, grand responsable des mesures d’urgence, qui pilotait l’opération.
Les ponts devaient être prêts à être bloqués en 36 à 48 heures suivant la décision de Québec.
« On était certains qu’on allait confiner Montréal, pour nous, c’était l’évidence, raconte une source policière bien au fait des discussions. Mais nous avons compris rapidement que la Ville ne voulait pas se rendre là. »
FILES INTERMINABLES
Selon nos sources, les autorités ont rapidement constaté que ce plan aurait pu causer plus de mal que de bien.
Par exemple, même au plus fort des mesures de confinement, 35 000 voitures par jour empruntaient toujours le pont Jacques-Cartier.
Il aurait fallu 1000 patrouilleurs, soit 20 % de tous les effectifs de la province, pour contrôler les allées et venues. Les files d’attente aux contrôles policiers auraient été interminables, ce qui aurait pu avoir des impacts sur le réseau de la santé, dont beaucoup d’employés habitent les banlieues de Montréal.
Quelques jours plus tard, le 28 mars, notre Bureau d’enquête révélait que la santé publique de Montréal avait en préparation une série de mesures, dont des limitations de déplacement dans un rayon de 1 km du domicile. L’annonce a été reportée, puis carrément annulée.
MESURES PLUS MUSCLÉES
Selon plusieurs sources, si la directrice de la santé publique de Montréal, Mylène Drouin, voyait d’un bon oeil des mesures plus musclées, la mairesse, Valérie Plante, elle, était plus réticente.
Tous s’entendent pour dire qu’un confinement de l’île aurait nécessité l’aval du gouvernement du Québec (voir autre texte).
Questionné par notre Bureau d’enquête, le ministère de la Santé n’a pas voulu s’avancer sur des aspects précis des plans pour l’île de Montréal.
« Les avantages et les désavantages des mesures de confinement […] ont été évalués. Les mesures recommandées par les autorités de santé publique reposent d’abord et avant tout sur des considérations de santé publique », nous a-t-on répondu.